Soumission

Dimanche 12 juillet 7 12 /07 /Juil 22:41

Bonjour, 

Je m'appelle Claire. Claire Grenadine. C'est rigolo comme nom, vous ne trouvez pas ? 

Je suis étudiante au Severity College. Le Severity College est un établissement qui dispense des cours de rattrapage aux étudiantes en difficulté dans leurs études universitaires.

J'en ai bien besoin car à 19 ans, je suis engagée dans des études de droit dont je ne vois pas le bout. A vrai dire, j'aurais aimé avoir fini avant même d'avoir commencé. Le droit, ça fait sérieux mais c'est difficile de trouver plus rasoir. Je n'ai pas eu mon mot à dire. Ce sont mes parents qui ont choisi pour moi. Il te faut quelque chose de solide entre les mains. Nous savons ce qui est bon pour ton avenir. Le droit mène à tout. Plus tard, tu nous remercieras. 

Moi, la seule chose qui me branche, c'est la musique et les fringues. Mon rêve serait de pouvoir un jour devenir styliste et ouvrir une maison de couture à mon nom.

En attendant, je suis encore loin du compte. Le Severity College est administré d'une main de fer par sa Directrice, Maîtresse Cindy, qui y fait régner une discipline très stricte. C'est peu de dire qu'elle est autoritaire. J'ai l'impression d'être surveillée en permanence. Il faudrait que je me tienne à carreaux mais il n'en est pas question, j'ai horreur d'obéir. Alors les punitions tombent régulièrement. J'en ai pris mon parti. 

Heureusement, pour m'évader un peu, je me réfugie dans l'écriture, je rédige un journal. Je l'ai appelé « Les petits secrets de Claire Grenadine ». Le titre me plaît beaucoup. Il sonne comme une friandise. Comme un sachet de rouleaux de réglisse ou de fraises Tagada. 

Je me suis dit qu'il pourrait peut-être vous intéresser. Mais comme je ne voudrais pas vous lasser, j'ai pris le parti d'en sélectionner quelques extraits à votre intention. Ceux qui mettent en valeur les événements marquants de ma vie d'étudiante et les relations tourmentées que j'entretiens avec Cindy, ma maîtresse. 

Ma maîtresse dans plusieurs sens du mot. Cindy est à la fois mon professeur et ma dominatrice.

Mais là, je préfère vous arrêter tout de suite, ce n'est pas du tout ce que vous croyez. Vous pouvez oublier tous les clichés habituels sur le SM, les croix de Saint-André, les chaînes, les cagoules, les candélabres... 

Ce que je vis dans la réalité est très différent et nettement plus original. Pour moi, Maîtresse Cindy est beaucoup plus qu'une maîtresse. C'est une partenaire de jeu pleine d'imagination, de sensibilité, de poésie et d'humour. Vous ne pouvez pas vous imaginer les choses incroyables qu'elle me fait faire... 

Non, non, vous ne pouvez pas ! 
clairegrenadine@hotmail.fr

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Jeudi 15 octobre 4 15 /10 /Oct 19:30

Le texte ci-dessous constitue l’avant-propos de mon journal intime que j’ai intitulé « Les petits secrets de Claire Grenadine ». 

Ce n’est certainement pas le hasard qui m’a poussée à sonner à la porte du donjon de Maîtresse Cindy par un bel après-midi de mai 2002. Ma démarche était au contraire tout à fait réfléchie, volontaire, déterminée. Sans doute inconsciemment était-elle l’aboutissement d’un processus engagé déjà depuis plusieurs années. 

Car l’histoire montre qu’il m’a fallu du temps pour en arriver là. Pour franchir le cap. Pour me jeter à l’eau. Pour passer à l’acte. Avec le recul, non seulement je ne le regrette pas mais j’en suis même très heureuse. Cette vie parallèle, ce jardin secret, cette promenade hors des sentiers battus, se sont révélés pleins de découvertes, de surprises et d’émotions. 

Il faut bien reconnaître qu’une telle aventure pouvait me conduire aux confins de l’imprévisible, sur des terres inconnues. Car elle contenait forcément une part de risque. Rien n’est jamais innocent. Il fallait donc que je m’y prépare. Sans qu’il m’ait semblé nécessaire pour autant de justifier de qualités exceptionnelles. Tout juste pouvais-je présenter quelques dispositions particulières. La plus importante, à mon sens, était de me sentir motivée. D’avoir envie. D’être prête à vivre l’expérience avec intensité. 

Alors pourquoi ? Pourquoi en 2002 ? Pourquoi tout court ? Et pourquoi avec Maîtresse Cindy ? 

Pourquoi en 2002 ? J’imagine que jusque là, l’attirance était déjà latente mais que l’interdit exerçait une pression encore plus forte. Une question d’âge, de maturité, de caractère. Ajoutée à la prise de conscience progressive que ce monde souterrain n’était pas un lieu imaginaire, qu’il existait bel et bien quelque part et que le plus difficile n’était pas de partir à sa recherche mais d’oser vraiment y pénétrer, de nouer le premier contact. L’idée a lentement fait son chemin. Au fil des ans, le curseur s’est insensiblement décalé sur le bras de la balance. 

Pourquoi tout court ? A cette question apparemment simple, la réponse n’est ni unique ni facile. Je l’aborde brièvement ici car ce n’est pas précisément un sujet que je développe dans les pages qui suivent. Elle me renvoie à moi-même dans ce que j’ai sans doute de plus intime. A ma vie. A l’éducation que j’ai reçue. Difficile de démêler l’écheveau entre l’attrait pour ce qui est défendu, le besoin compulsif de faire sciemment de grosses bêtises, le goût de l’évasion, l’envie de passer à des plats plus épicés, de vivre des expériences qui sortent de l’ordinaire, de me libérer, de jeter mon bonnet par-dessus les moulins, de retrouver des sensations oubliées qui remontent à l’adolescence, voire à l’enfance, de me dépouiller de mes habits de tous les jours pour me sentir enfin vraiment moi-même, de pénétrer dans un monde sans tabou, attirant et secret, prêt à accueillir mes fantasmes sans chercher à les juger… Ce sont ces éléments qui m’ont conduite un jour à composer un numéro sur un cadran et à me confier à celle qui saurait les comprendre et les satisfaire.

Et ce jour-là, c’est Maîtresse Cindy qui m’a répondu. Il a suffi au tout début du timbre d’une voix au téléphone, précédé d’une photo montrant l’aménagement d’un donjon extraordinaire, dissimulé quelque part dans les profondeurs de Paris. Je me souviens en particulier du cadre d’une salle de classe reconstituée comme autrefois, avec son tableau noir, son estrade et ses rangées de pupitres…Il ne manquait plus que les personnages pour l’animer. Je n’étais pas encore Claire mais je le suis vite devenue. Car tout était réuni pour que je le devienne.

Lorsqu’est arrivé notre premier rendez-vous, le mardi 7 mai 2002 - sobrement noté « Dentiste » sur mon agenda professionnel -, l’impression initiale s’est confirmée. J’ai tout de suite aimé son physique, son naturel, sa façon d’évoluer, de jouer, de surprendre. Et puis j’ai rapidement appris à apprécier son intelligence, sa finesse de caractère, sa sensibilité, son intuition, son humour, son originalité, la diversité de ses centres d’intérêt (la musique, la littérature, la peinture, la photographie, la nature), son goût du jeu, son sens de l’improvisation… Nous sommes rapidement devenues complices.

Les pages qui suivent renouent fidèlement le fil d’Ariane de nos rencontres et de nos échanges. Une sorte de journal, de carnet de bord, de bloc-notes. Avec des dates, des descriptions, quelques commentaires. Un compte rendu purement chronologique et factuel. Tout l’opposé d’une somme de réflexions sur le sadomasochisme. L’objectif est nettement plus modeste. Il consiste à garder trace sur le vif des bons souvenirs. De les attraper au vol pour les enfermer immédiatement dans ma boîte à trésors. Celle dont j’aime régulièrement soulever le couvercle pour en respirer les effluves parfumés. 

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Vendredi 16 octobre 5 16 /10 /Oct 10:35

Élève de l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs (ENSAD), Barbara Ryckewaert a séjourné plusieurs mois en stage dans le donjon de Maîtresse Cindy fin 2007, début 2008. C’est là qu’à diverses reprises, j’ai eu l’occasion de la rencontrer et de participer indirectement, en tant que partenaire de jeu, au projet qu’elle avait choisi de réaliser dans le cadre de son cursus universitaire. 

Je n’en ai découvert les résultats que plus tard mais j’ai tout de suite été séduite par l’approche très personnelle qu’elle avait adoptée. Face au SM, qui n'est pas un sujet facile à traiter, Barbara a su éviter de tomber dans le piège de la facilité. Ses photos apportent au contraire, à mon sens, un éclairage très original. D’abord parce qu’elles concourent à dédramatiser cette activité largement méconnue. Non, il ne se passe pas des choses épouvantables entre les murs épais des donjons. En tout cas, pas dans celui de Maîtresse Cindy. Ensuite, parce que sous l’apparence du jeu, elles suggèrent que quelque chose de beaucoup plus profond est en train de se nouer : une relation particulière entre deux acteurs qui se livrent l’un et l’autre totalement. Enfin, parce qu’elles réussissent à saisir au vol des instants de plénitude, d’émotion et de poésie que d’autres formes artistiques comme l’écriture ne rendraient sans doute pas aussi intensément.
Vous trouverez, ci-dessous, un aperçu du travail réalisé par Barbara sous la forme d’une sélection de photos et d’un clip sonore en lien avec son site. Ma contribution personnelle à cet ensemble se limite à réunir l’image et le son en assortissant l’une et l’autre des commentaires enthousiastes qu’ils m’ont inspirés.

 

L’IMAGE…

 

 
 


UN AUTRE REGARD

 

C’était très exactement le 19 décembre 2007. Maîtresse Cindy m’avait prévenue. 14h.30 précises. Madame l’inspectrice ne supporterait aucun retard. Il fallait absolument que je sois à l’heure. Elle semblait y attacher beaucoup d’importance. Comme si son avenir de directrice du Severity College en dépendait. Pour toute réponse, je l’avais fixée dans le blanc des yeux comme j’adore le faire. En la défiant sans rien dire. Pour une fois que je tenais ma revanche, je n’allais pas la laisser m’échapper. Je suis donc arrivée cinq minutes en retard. Pour le principe. Le visage épanoui. Un léger sourire au bord des lèvres. Il faisait beau. J’avais bien déjeuné. Madame l’inspectrice m’attendait au pied des marches avec tout son barda. A ses côtés, la directrice n’a pas pu se retenir de m’apostropher sur un ton furieux. Une faute impardonnable. Doublée d’une marque d’insolence caractérisée. Encore mes caprices de star. Quand finirais-je par comprendre que le règlement s’appliquait à tout le monde ? A commencer par moi.  

Avais-je, en effet, bien pris conscience de la situation ? Madame l’inspectrice s’était tout spécialement déplacée pour prendre des photos du collège, des élèves, des classes, des dortoirs, du terrain de hockey. Sans doute pour illustrer une plaquette vantant les mérites de l’établissement et les vertus de l’éducation anglaise. Ou pour d’autres motifs que j’ignorais. 

Je n’allais par tarder à le savoir. Maîtresse Cindy m’a empoignée fermement par le bras et conduite à travers le dédale des couloirs jusqu’à son bureau. Afin d’y poursuivre à huis clos un interrogatoire musclé. Et puisque Madame l’inspectrice en personne était là, elle allait profiter de l’aubaine. Elle verrait de ses propres yeux comment on remet une jeune fille effrontée dans le droit chemin. Celui de la rigueur et de la discipline… De quoi compléter son reportage par quelques séquences inédites. Prises sur le vif.  

Et après ? Vous voulez savoir la suite ? Eh bien, je ne vous la raconterai pas. Tant pis pour vous. Car l’essentiel de mon propos n’est pas là. Non, il est ailleurs. Je crois plus utile de vous faire part de mes sentiments lorsque j’ai découvert, quelques jours plus tard, les photos prises ce jour-là. Elles avaient été jointes à mon carnet de correspondance.  

Je me souviens très bien de ma première réaction. La vérité m’oblige à dire que j’ai été déçue en les regardant. Non, ce n’était pas du tout ce que j’attendais. Je n’aurais pas appuyé sur le déclencheur à ce moment-là, dans cette situation-là, sous cet angle-là. Madame l’inspectrice avait tout faux. Du coup, j’ai réalisé que sans m’en rendre compte, je m’étais faite à l’avance une idée relativement précise de ce que j’allais voir. Une vision assez égocentrique et, je dois bien l’avouer, plutôt dépourvue d’originalité. Sans doute trop inspirée de ce qui se fait communément en matière de photos dites de charme. Des plans larges qui ne laissent rien dans l’ombre. Un sujet crucifié par le faisceau des projecteurs. Ou bien au contraire très rapprochés. Presque chirurgicaux. A croire que j’ai des fantasmes masculins. Il va falloir que je me surveille. Dans mon inconscient, nous ne devions pas être très loin des images qui égaient les pages centrales de certaines revues spécialisées. Lionnes échevelées. Bêtes à plaisir. Pin up siliconées. Odalisques languissantes. Couchées sur papier glacé. Oh oui ! Oui !!!!!! Encore !!!!!!!! L’image toute faite et sans imagination de la photo érotique. 

Confusion totale. Erreur sur toute la ligne. Procès d’intention. La honte ! Inspectrice Barbara, je vous demande d’accepter mes excuses, j’ai fait fausse route, manifestement, vous ne jouez pas dans cette catégorie-là. Vous valez beaucoup mieux. Vous avez créé votre propre style. Suivi votre inspiration personnelle. Loin de céder à la facilité immédiate, à l’image stéréotypée, vous savez au contraire poser sur les êtres, sur les situations, sur les choses, un regard qui vous est propre. Un regard inédit. Un autre regard. 

Celui-ci est à ce point original qu’il en est parfois déroutant. Car à travers vous, j’ai découvert ce qui peut apparaître comme une évidence : une même réalité peut donner lieu à une large diversité de perceptions et de sensibilités. On ne voit pas les choses de la même façon selon que l’on est dominatrice, dominée ou spectatrice extérieure. Vous avez rapidement perçu que le SM était tout sauf un sujet anodin. Qu’il ne se laissait pas photographier comme la pyramide du Louvre ou le Mont-Saint-Michel. Et que s’il devait rester un jeu, il s’agissait d’un jeu un peu spécial pour adultes consentants. Juste au bord de la falaise. Avec ses codes. Avec son lot d’émotions, de fantasmes, d’obsessions, d’interdits. Votre mérite est d’avoir su capter cette tension et la restituer. 

Comment ? A mon avis, d’abord en choisissant le bon sujet, le corps. C’est effectivement le sujet central du SM. Le corps sous toutes ses formes - nu, habillé, transformé - et dans toutes les positions - debout, allongé, ligoté, bâillonné, suspendu, étiré, crucifié, à genoux, prosterné, à quatre pattes. Mais pas le corps n’importe comment, le corps pour le corps. Non, le corps pour ce qu’il exprime de pulsions, de douleur, d’excitation et de plaisir. Un corps qui se soumet. Un corps qui résiste. Un corps qui se tend. Un corps qui exulte. Un corps qui se donne. Saisi au travers d’un geste ou d’un détail. Parce qu’un détail apparemment insignifiant peut être, plus que le reste, porteur de sens. Des mains qui se frôlent, se rejoignent, s’affrontent. La pointe acérée d’une bottine. Comme si vous vouliez savoir ce qui se passe à ces moments précis. Raideurs ou abandons, certitudes ou doutes, défis ou renoncements. 

Ensuite, en sélectionnant le cadre. Le plus souvent rapproché. Parce qu’il faut se fixer sur l’essentiel. Ne pas se perdre dans le superflu. Canaliser le regard. Restituer ce que vous avez perçu ou ressenti. Parce qu’il s’est passé effectivement quelque chose. Vous en avez eu l’intuition. Vous souhaitez la faire partager. Quitte à ce que l’image soit insolite. Une photo ne se laisse pas nécessairement comprendre au premier coup d’œil. Sans effort. Au-delà de l’image, il y a bien plus. Il y a la présence de deux êtres. Le SM n’est pas un exercice solitaire. C’est un plaisir partagé par deux acteurs qui se mettent mutuellement en valeur. Un jeu de construction et d’équilibre aussi. Avec ses différents plans. La verticalité des jambes. L’horizontalité d’une estrade dans une salle de classe. Et sa part de mystère. Enfouie au fond d’une cave. Abritée derrière les murs épais d’un donjon. Anonymat des personnages. Un homme ? Une femme ? A qui appartient cette main ? A la dominatrice ou à sa partenaire ? Qu’est-ce que cela change ? Est-ce si important de le savoir ? 

Et puis, il y a la couleur. Ou plus exactement l’absence de couleur. La couleur disperse l’attention. Le noir est originel. Il faut partir du noir pour comprendre la couleur, la lumière et le monde. Un noir Soulages d’où surgirait une clarté lumineuse. Révélatrice de toute une palette de dégradés. De contrastes entre l’obscurité et la lumière. Depuis le noir intense jusqu’au noir gris en passant par le bleu noir. Un jeu subtil de nuances qui donne de la profondeur au sujet et en accentue la mise en scène.  

Le sujet, le cadre, la couleur. Se limiter à l’essentiel pour faire passer un message. Pour suggérer un sens. Sans chercher à tout prix à l’imposer. Parce que les passions s’exacerbent davantage dans le silence des esprits que dans le dérèglement des corps. Des photos construites. Intimistes. Respectueuses. Intelligentes. 

Voilà, Inspectrice Barbara, ce que je souhaitais vous dire. Avec mes mots à moi.  

Maintenant il est temps que je vous quitte. Vous connaissez Maîtresse Cindy. L’heure, c’est l’heure. Elle est intraitable. Si elle apprend que je suis encore en retard, je vais finir par me faire tirer les oreilles. Les oreilles ? Oh oui !!!!!!!!, vous savez quoi, Inspectrice Barbara, je crois que je vais être en retard !

  

ET LE SON…


Pour accéder aux clips sonores réalisés par Barbara, cliquez ici  

     

C’est avec beaucoup d’intérêt et d’amusement que j’ai pris connaissance du clip « Claire Grenadine ». En même temps qu’il me rappelle des souvenirs agréables, il suscite de ma part trois brefs commentaires.  

La première qualité de Barbara, c’est sa discrétion. On ne l’entend pas. On la devine à peine. Elle doit être là, en retrait, quelque part. Le jeu commence, on pense à autre chose et on oublie sa présence. C’est aussi ça, l’art du photographe ou du preneur de son. La meilleure photo, le meilleur son, c’est finalement celle ou celui auquel on ne s’attend pas. Lorsque le doigt appuie sur le déclencheur parce qu’il se passe quelque chose. Un geste qui vous vient, une image qui vous obsède, un mot qui vous échappe...  

Ma deuxième réflexion est liée à l’existence même du donjon. Celui-ci est souvent présenté ou perçu comme une sorte de forteresse inattaquable du dehors. Comme un bastion inaccessible. Mais on oublie que loin d’être un espace qui enferme, il est aussi et peut-être même surtout un lieu qui libère. A l’abri de ses murs infranchissables, on y éprouve paradoxalement un sentiment accru de sécurité et de liberté. Le donjon est alors un espace de jeu où tout devient possible.  

Enfin, dans le SM, il n’y a pas que l’image qui compte. Le son, lui aussi, est primordial. C’est l’originalité de la démarche de Barbara de montrer qu’il peut se passer des choses parfois amusantes et inattendues dans un donjon et que ce dernier est tout sauf un espace immobile où régnerait un silence de cathédrale. On peut y pleurer. Mais on peut y rire aussi. Le SM est un art vivant. Comme l’image, la parole est chargée de sens. C’est elle qui permet de libérer les fantasmes, de susciter le dialogue, d’encourager le jeu…  

Ce soir-là, je défilais sur un podium avec mes bottes de drag queen. Elles étaient rouges. Du même rouge ardent que la combinaison de ma maîtresse… Maîtresse Cindy…

 

 

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Mardi 3 novembre 2 03 /11 /Nov 19:30

Sur le chemin qui me conduit au donjon de Maîtresse Cindy, je pense à cette phrase célèbre attribuée à Georges Clemenceau, « Ce qu’il y a de meilleur dans l’amour, c’est quand on monte l’escalier ». Tout à l’heure, lorsque je serai sortie du métro, l’escalier que j’emprunterai à mon tour, je ne le monterai pas mais je le descendrai. Peu importe. Je ressentirai la même chose. Ce sentiment de trac, d’excitation, ce pincement au cœur, ce picotement, cette légère tension qui serre l’estomac. Car si la pièce qui va se dérouler est déjà largement écrite à l’avance et les personnages connus, le scénario est vierge. Une page blanche. Au début de son interview sur France Culture, Maîtresse Cindy explique que son rôle est de surprendre et d’aider ses partenaires à se dépasser. Surprendre, se dépasser. Oh oui, complètement ! Mais il ne faudrait pas que cela vienne seulement d’elle. Tous les acteurs doivent être bons. Non pas par obligation. Par simple souci d’équilibre ou de cohérence. Pour que la troupe soit homogène. Mais tout naturellement par plaisir. Par complicité. Lorsque le partenaire donne le meilleur de lui-même, il est impossible de rester en retrait. L’émulation stimule. Pour que la pièce soit un succès, il faut que de mon côté aussi, je sache la surprendre. Et me dépasser. Par tous les moyens. Par ma tenue, par mes réactions, par mes émotions, par mes silences. Sans pour autant sortir de mon rôle. Au risque de jouer faux.  

En attendant, il faut que je me prépare. Que je me glisse dans la peau de mon personnage. Les trajets en métro, c’est pratique et c’est aussi fait pour ça. Pour rêver les yeux ouverts. Pour visualiser le film avant même que la pénombre ne s’installe dans la salle et que l’écran s’éclaire. Cette séance, j’y ai tellement pensé. Nous l’avons même presque déjà répétée en échangeant des messages. J’y ai glissé quelques indications scéniques en espérant qu’elles seront prises en compte. Au fur et à mesure que je marche, la tension augmente. Je pourrais presque me planter devant une boutique et constater dans le reflet de la vitrine que j’ai déjà mes couettes. Oui, ça y est, je suis prête. Je ne suis plus un autre, je suis moi. Et non pas l’inverse. Je suis Claire. Les passants qui me croisent ne le voient pas mais moi je le ressens. La féminité, ça se vit surtout de l’intérieur.  

17 heures. Pile à l’heure. Madame la Professeur Principale a bien insisté pour que je sois ponctuelle. Une pression sur le bouton de la sonnette. Le son d’un carillon lointain. L’attente. Elle ne se précipite jamais. Il faut toujours patienter. Oh jamais très longtemps. Mais un peu quand même. Je le sais. Je m’y suis habituée. Pour moi, cela prolonge agréablement le plaisir. Peut-être n’est-elle pas tout à fait prête. Peut-être le fait-elle exprès. Parce que c’est sa façon à elle de me déstabiliser. De me conditionner. On ne sonne pas une dominatrice. Elle consent à vous ouvrir. A vous accepter ou non comme partenaire de jeu. En vous signifiant dès le début que c’est elle qui commande. Et que c’est vous qui devrez obéir.  

Mon cœur se met à battre plus fort. C’est quand on s’apprête à jouer que la véritable vie palpite. Quand le silence se fait. Quand le rideau se lève. Que l’acteur entre en scène. Qu’il sort de l’ombre. Qu’il s’extrait de lui-même pour exister autrement. Qu’il naît. 

Elle m’ouvre. Comme elle a l’habitude de le faire. Dissimulée derrière la porte. Laisser le mystère planer le plus longtemps possible. Surprendre, c’est aussi commencer par cette étape préparatoire. Se découvrir au dernier moment. Petits cheveux blonds. Encore plus blonds que d’habitude. La coupe aussi, me semble-t-il, est légèrement différente. Ça la rajeunit. Je pourrais le lui dire mais je ne je fais pas. Éviter le compliment à cent balles. Trouver le ton juste, ce n’est pas toujours facile. Et puis son habillement est un peu déroutant. Survêtement noir. Haut zippé. Petit tutu en mousseline blanche à la taille. Chaussures de sport. Je crois comprendre que la séance va être sportive. Dans tous les sens du mot.  

Je fais semblant de ne pas voir la main qu’elle me tend afin de l’embrasser sur les joues. C’est tout de même plus sympathique. Moins « réglementaire » mais plus chaleureux. J’enlève mon imperméable ainsi que mes chaussures. Il me semble reconnaître la musique ambiante. Il ne s’agit pas du Miserere d’Allegri, comme je le croyais, mais du Stabat Mater de Pergolèse. Elle me conduit, non pas vers la salle de classe comme nous le faisons habituellement, mais vers la salle de méditation zen.  

Ayant bien compris que j’allais faire (ou que je revenais) du sport, elle m’a préparé mes vêtements et des accessoires : un mini short blanc, un soutien-gorge assorti, des petites prothèses mammaires, des chaussettes et des tennis blanches. Je lui dis que je suis venue avec mon matériel. C’est d’ailleurs la première fois que cela arrive depuis que nous nous connaissons. Apparemment, elle ne sou haite pas avoir la surprise de le découvrir au dernier moment et préfère examiner d’abord ce que j’ai apporté (sans doute pour vérifier que ma tenue ne fera pas obstacle aux exercices divers auxquels elle a l’intention de me livrer). Je sors donc mon petit ensemble gris à galons roses (mini short et brassière assortie), une paire de chaussettes avec une rayure rose au niveau de l’ourlet, deux bracelets en coton dans les roses à glisser aux poignets (agrémentés du logo de la souris Diddle), mon string fluo rose, une paire de lunettes Lolita roses (que je n’aurai pas le temps de lui montrer) et deux boîtes contenant toutes sortes d’élastiques de couleur, notamment roses, pour les cheveux.  

Finalement, nous composons un habillement mixte, puisant à la fois dans les réserves de l’une et de l’autre : petit ensemble gris et rose, culotte en latex rouge, coussins mammaires en silicone, chaussettes à rayures roses, tennis blanches. Elle semble tenir tout particulièrement à la culotte en latex. Visiblement, ce sera une composante essentielle du jeu à venir ! Je n’oublie pas la perruque bleue, aux couettes de laquelle j’enroule des élastiques roses. Tandis que je m’habille, un rappel à l’ordre est diffusé par le haut-parleur. La maîtresse nous demande de nous dépêcher (je suis supposée être au sport, sans doute dans les vestiaires, avec mes camarades de classe). Mademoiselle Claire, quand vous serez prête, vous vous mettrez à genoux en position de conformité devant le miroir. Je m’active. Sans omettre cependant de m’accorder quelques secondes pour me contempler dans la glace. Le résultat me plaît beaucoup. Tout. L’allure générale, le petit shorty, la brassière, les cuisses, les jambes. Loin de me sentir ridicule je me trouve même plutôt jolie. En tout cas, tout à fait en accord avec mon personnage. C’est sans doute l’essentiel. Mais peut-être aussi que je me trompe complètement.  

Maîtresse Cindy entre dans la salle et m’autorise à me relever. Elle me tend la main. La séance commencera exceptionnellement par un baisemain. J’imagine qu’un baise-pied ne serait pas approprié car elle est en chaussures de sport. Elle m’explique que nous allons commencer par une séance de gymnastique en musique (tango argentin). Je suis censée reproduire les mouvements qu’elle effectue debout face à la glace. Nous sommes à la même hauteur, côte à côte. D’abord des exercices d’échauffement du bas du corps. Une jambe en avant, gauche, droite. Puis une jambe en arrière, gauche, droite, puis une jambe contre les fesses, gauche, droite. J’essaie de suivre le rythme de la musique et de faire des mouvements dans le même sens que ma maîtresse. Pas évident mais j’y arrive à peu près. Enchaînement avec le haut du corps par une série de moulinets avec les bras. La musique bien rythmée facilite les choses. Fin du premier exercice. 

Le deuxième se déroule également debout, mais cette fois, il vise à affiner la taille. Rotation du buste au moyen d’un bâton tendu à l’horizontale posé derrière la nuque, au niveau des épaules. La difficulté consiste à garder le bassin fixe. Maîtresse Cindy corrige ma position. Elle effectue également le mouvement avec moi. Toujours avec le bâton, il s’agit maintenant de se pencher sur le côté, à gauche d’abord, à droite ensuite.  

Troisième série d’exercices. Cette fois au sol. Maîtresse Cindy me demande d’aller chercher dans un coin de la pièce les deux tapis de sol qu’elle a préparés à notre intention. Nous les déroulons par terre et nous nous allongeons pour des exercices concentrés sur les abdominaux et les fessiers.  

Abdominaux d’abord. Maîtresse Cindy se rend compte rapidement que quelque chose ne va pas. Elle me demande de baisser mon shorty et elle constate immédiatement que j’ai mis ma culotte en latex à l’envers (l’arrière à la place de l’avant). Elle me demande de la reme ttre à l’endroit et de remonter mon short par-dessus. Je le fais et découvre, en effet, que l’arrière de la culotte est équipé de deux zones circulaires (une sur chaque fesse). Chacune est constellée de petits cercles en relief munis de piquants en plastique. Du coup, je comprends mieux son insistance à me demander de m’asseoir sur mon tapis de sol. Les exercices reprennent. Petits battements en ciseaux, jambes parallèles au sol. Puis roulades en arrière les mains au niveau des cuisses. Retour à la position initiale tout en conservant l’équilibre (i.e. sans laisser les pieds toucher le sol). A chaque mouvement, je sens les petits picots s’enfoncer dans mes fesses. Sensation irritante et désagréable. Maîtresse Cindy en est bien consciente et cela la fait rire car de temps en temps, je ne peux pas m’empêcher de pousser des gémissements.  

Les fessiers ensuite. Nous sommes allongées l’une en face de l’autre. Il s’agit d’élever la jambe dans le prolongement du buste et d’effectuer des battements de haut en bas. Une série du côté gauche. La même chose du côté droit. Maîtresse Cindy insiste pour que je repasse sur le dos avant de changer de côté (uniquement pour m’obliger à poser mes reins par terre et à me piquer sur ce matelas de petits picots qui m’entrent dans la chair).  

Pour terminer, affinement de la taille. Nous sommes sur le côté. Jambes posées par terre dans le prolongement du corps, avant-bras replié. Il s’agit de soulever le corps et de tenir en faisant des petits mouvements de haut en bas. Une série à gauche. Une série à droite. Cette série n’est pas douloureuse pour moi car mes fesses sont « en l’air » (Toute ma vie, toute ma vie, j’ai rêvé d’être une hôtesse de l’air….). En passant, j’en conclus que Maîtresse Cindy est une pratiquante (assidue ?) de la gym taille-abdos-fessiers. 

Après ce dernier exercice, je suis autorisée à me relever. Maîtresse Cindy me tend une jupe longue en me donnant le choix de la porter ou non. Je l’essaie mais je préfère finalement conserver mon short dans lequel je me trouve plus mignonne. Elle me demande de compter jusqu’à trente avant de la rejoindre dans la salle de classe. Il lui faut également le temps de se changer. Collant noir. Haut noir zippé. Mini kilt noir et blanc. Bottines noires. Elle est beaucoup plus sexy dans cette tenue. Je ne le remarquerai pas tout de suite car pour cette deuxième séquence, la mise en scène a été soignée. Quand je rentre dans la salle de classe, rupture de rythme et de ton, l’ambiance est subitement plus solennelle et plus froide. Maîtresse Cindy a pris place derrière son bureau et me fait signe d’avancer jusqu’à elle. J’obéis. Elle a l’air sévère et dure. La scène de la convocation. A mon avis, j’ai dû faire une grosse bêtise. Mais naturellement, je ne vais pas prendre les devants. Je vais la laisser venir. Je me suis préparée. 

« Mettez-vous à genoux devant le bureau, Mademoiselle Claire ! Vous avez vu l’heure ? » Apparemment, j’ai une demi-heure de retard, contrairement à ma camarade Aurélie, qui sort du bureau et qui, elle, était ponctuelle (celle-là, elle commence à m’énerver). Je présente ma défense. J’étais à ma séance de sport, match en cours, obligée de rester jusqu’à la fin. Désolée. Je ne pouvais pas partir comme ça. J’ai fait tout mon possible pour revenir le plus vite possible. D’ailleurs, je n’ai même pas pris le temps de me changer. « Et vous croyez que c’est une tenue pur vous rendre à la convocation de votre professeur principale ? » (bien joué, Cindy !). Ça y est. Le décor est en place. Le deuxième acte commence. Les personnages se mettent en voix. Il faut garder ce rythme.  

« Posez les mains à plat sur le bureau. » Ma maîtresse se lève et me donne un coup de badine sur les doigts. Aurélie m’a dénoncée. Je m’y attendais. Elle aurait découvert une photo compromettante dans mes affaires et se serait empressée de la transmettre à Maîtresse Cindy. L’histoire ne dit pas si elle a été punie de son côté. Je comprends que nous sommes coupables l’une et l’autre pour des motifs différents. J’aurais aimé voir Aurélie sortir du bureau. En attendant, c’est à mon tour d’être interrogée. Il faut que je réponde à mon interlocutrice de façon cohérente et censée. Sans aller pour autant dans son sens et lui faciliter la tâche. A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Observer comment elle mène l’interrogatoire. Tester ses capacités de réaction. Opposer de la résistance. Tenter de la mettre dans l’embarras. « Et des photos comme ça, vous en avez d’autres, Mademoiselle Claire ? » Je m’y attendais. A mon avis, c’est une question qui est posée autant par Cindy que par Maîtresse Cindy. Répondre avec assurance. « Non, Madame, c’est la seule. » Si elle savait ! Elle n’insiste pas. De toute façon, j’ai prévu une explication au cas où elle pousserait la curiosité trop loin. Rester dans ce registre. Difficile de nier mais ne pas se laisser faire. Jouer vrai. La collégienne prise en faute, qui n’ignore pas le sort qui l’attend, mais qui fera tout pour essayer de s’en sortir. « Vous savez comment on punit les élèves qui commettent ce genre de fautes, Mademoiselle Claire ? » « Oui, Madame. »? « Et comment ? » « Par une fessée. » Le mot-clé. Le déclic. Celui que j’attendais. Et qui va entraîner ma chute.  

Du bout de sa badine, Maîtresse Cindy fait rouler deux dès à jouer de couleur verte sur le plat de son bureau. C’est curieux cette habitude qu’elle a d’associer à ses jeux les nombres et les chiffres. Sans doute une autre façon de surprendre. Une part d’aléa, de fantaisie, dont elle n’a pas la maîtrise, dans une scénographie alignée au cordeau. Réglée au millimètre. Mes mains sont restées posées à plat de part et d’autre. On ne m’a pas dit de les retirer. Elle me demande de prendre les dés et de les lancer. J’obéis. Le sort en est jeté. Nous faisons la somme des deux dés. 6+2=8. Petit sourire de Maîtresse Cindy quand le dé s’immobilise sur le 6. Elle note le total au marqueur rouge sur une feuille de papier. Je recommence. 3+2=5. Ce chiffre est également noté. De la combinaison des deux données va résulter la gravité de ma punition : je serai fessée avec huit instruments différents pendant cinq minutes chacun. Finalement, ce n’est pas totalement elle qui l’a fixée. Par le hasard des nombres, par mon adresse ou par ma maladresse, c’est aussi moi qui y ai contribué. Le tout sera dûment chronométré. Maîtresse Cindy a tout prévu. Un petit compte minutes digital blanc est posé sur son bureau.  

Je suis autorisée à me relever. Elle me laisse la liberté d’aller et venir dans les pièces du donjon afin de sélectionner les huit instruments qui serviront à exécuter la sentence. Car là encore, ce n’est pas elle qui les choisira. C’est à moi qu’il revient de le faire. Dans un premier temps, Il faut que je les lui rapporte un par un et que je les aligne sur l’estrade. Je n’ai pas à aller bien loin. Ils sont tout proches, à portée de main, dans la salle de classe et dans la pièce qui la jouxte. Je choisis avec soin, partagée entre le souhait de ressentir des sensations différentes sans pour autant présumer de mes capacités à les supporter. De toute façon, l’épreuve risque d’être pénible. Le calcul est vite fait. Huit fois cinq minutes font quarante minutes. Quasiment une heure. Peut-être avec quelques pauses. Mais j’ai du mal à imaginer que je pourrai tenir sur cette durée. Je suis d’ailleurs sans illusion. Même si j’avais été plus chanceuse, Maîtresse Cindy se serait sans doute arrangée pour que le résultat reste inchangé. 10 fois 4 = 40. 2 fois 20 aussi ! Elle profite de mes allées et venues pour prendre des photos (j’avais demandé à ma copine Cindy d’emporter son appareil). 

Voilà, c’est fait. Non sans avoir hésité, j’ai jeté mon dévolu sur huit instruments et je les ai alignés sur l’estrade. Maîtresse Cindy m’ordonne de me mettre à genoux devant eux, puis de les nommer et d’en donner tour à tour une rapide description. En résumé, il y a deux martinets, une cravache, un fouet à longues lanières, un strap, un petit paddle en cuir, et pour finir deux paddles en bois (l’un en forme de raquette de jokari striée sur le dessus, l’autre en forme de battoir à linge épais et évasé). Elle me reprend sur une description, estimant qu’elle ne correspond pas à l’instrument en question. Il s’agit du deuxième martinet (celui qui est doté d’une tête articulée, spécialité maison, déjà bien connu des habituées, qu’elle utilise fréquemment, semble-t-il, et que j’ai déjà expérimenté à de nombreuses reprises, notamment lors de l’émission de France Culture en présence d’Irène et de son équipe). C’est en fait un prétexte pour le remplacer par un instrument de son choix Il s’agit d’un martinet de petite taille et en latex. Cette rectification une fois opérée, Maîtresse Cindy m’invite à classer de gauche à droite les instruments par ordre croissant de dureté. J’ignore si mon classement est le bon mais je ne change rien à la disposition existante. Maîtresse Cindy ne fait aucun commentaire. Advienne que pourra !  

Il faut maintenant que je me relève et que je pose les mains à plat sur le bureau de la première rangée, les jambes écartées, les fesses tendues en arrière. Je me mets en position. Premier martinet. Échauffement. Préparer progressivement la peau sur l’ensemble de la surface à corriger. La réchauffer. Accélérer progressivement la circulation sanguine par un balayage léger. Avant d’augmenter la cadence. Bien sûr, Maîtresse Cindy a pris le soin de baisser préalablement mon petit short gris. Mais j’ai encore ma culotte en latex. Plus pour très longtemps. Les coups s’intensifient. Je comprends que ma professeur veille à bien les répartir sur toute la surface disponible afin d’obtenir une couleur homogène. La durée totale de l’épreuve me pose question. Quarante minutes. A ce compte-là, c’est sûr, je ne vais pas en sortir indemne.  

J’imagine déjà le dialogue à la maison. « Attends, tourne-toi, mais qu’est-ce que c’est que ça ? Qu’est-ce que tu t’es fait ? C’est rien, ma chérie, c’est juste ma maîtresse qui m’a donné la fessée ! ». Enfin tant pis ! C’est parti ! J’aurais pu y penser avant. On ne peut pas désirer une chose et la refuser quand elle se présente. Que deviendrait le plaisir ? Et puis si cette pensée a traversé mon esprit, ce ne pouvait pas être celle d’une petite collégienne. La preuve que je ne suis pas suffisamment dans mon rôle. Il faut que je me reprenne. Les cinq minutes tardent à sonner. Je trouve le temps long. D’autant plus que les coups sont plus appuyés. Il faut que je me réserve p our la suite. S’il y a bien progressivité dans le processus, je n’en suis encore qu’au tout début. J’aurais même envie de plaquer mon buste sur le plat du bureau pour mieux me laisser tomber en avant, plier le corps au niveau de la taille et faire ressortir davantage mes reins pour les offrir aux lanières. Vieux fantasme de la discipline anglaise où la jeune élève reçoit sa punition, poitrine plaquée sur son bureau, jupette relevée et culotte baissée sur les cuisses. Je ne le fais pas car je sais que dans cette position, je serai encore plus vulnérable. Penser à s’économiser. Le plus dur est à venir. Nous n’en sommes jamais qu’au bout des cinq premières minutes. Maîtresse Cindy baisse ma culotte en latex et inspecte les résultats. Elle semble très satisfaite. Deux belles zones circulaires rosées et parsemées, à l’endroit des picots, de petits points rouges plus foncés, qu’elle compare à des coccinelles.  

Je suis autorisée à me redresser. Pas pour bien longtemps. Et à frotter mes fesses qui commencent à me piquer. Le temps aussi pour Maîtresse Cindy de régler son chronomètre. Elle me demande d’enlever ma culotte en latex. Mon short est enroulé autour de mes chevilles. Dans cette position nettement plus exposée, la correction reprend. Cette fois-ci avec le petit martinet en latex. Contact plus « lisse » et plus glacé. Lanières molles et courtes. Une simple impression. Tout dépend de la façon dont on le manie. Je comprends que le premier martinet avait été réservé à l’échauffement, celui-ci va « entrer dans le vif du sujet ». Je suis sans illusion. Effectivement, rapidement les coups sont plus appuyés et s’abattent sur mes reins. Les plus douloureux sont ceux qui s’égarent à la périphérie, sur le côté, là où le muscle est moins épais, la peau plus fine et tendre. Continuer à supporter. Se préparer à la suite. Je n’ai encore rien vu. Ouf, la sonnerie retentit. Pause. Massage des fesses. Cela me fait un bien fou de pouvoir apaiser le feu qui m’envahit, ne serait-ce que quelques instants.  

Changement de décor. « Suivez-moi jusqu’à la grille. » La fameuse grille d’entrée du Collège. Cadenassée. Je resterai debout. Culotte baissée. Maîtresse Cindy referme la grille. De l’autre côté des barreaux, elle a installé un miroir vertical qui me permet de me voir en pied. « Baissez votre culotte. » J’obéis. Elle me pose sur le haut du crâne un immense bonnet d’âne noir équipé par-devant et par-derrière d’une étiquette portant la mention « Ane ». Décidément, je suis gâtée. Elle ne perd rien pour attendre, la petite Aurélie ! Sauf que si je la dénonce à mon tour, je risque d’être punie pour l’avoir accusée. Avec Maîtresse Cindy, il faut s’attendre à tout. Pour le moment, je dois agripper les barreaux avec mes mains et cette fois-ci, ce sera à la cravache d’entrer en action. Maîtresse Cindy la manie avec dextérité. Perfectionniste. Le souci du travail bien fait. Propre. Élégant. Je me dandine un peu. Mon bonnet tombe. Je dois le remettre et le tenir avec les mains. Cela m’évitera la tentation de les utiliser pour protéger mes fesses en tentant d’arrêter les coups. Surprise. A plusieurs reprises, Maîtresse Cindy utilise sa cravache pour tapoter ma verge qui s’est dressée. Impossible de dissimuler que ce contact par-devant ne me laisse pas indifférente. Les coups sont bien dosés. Juste suffisants pour m’exciter. Elle en profite pour prendre une photo. Le chronomètre sonne. Encore cinq minutes d’écoulées.  

Mon gros fantasme serait qu’elle réussisse un jour à me faire réellement pleurer. Non pas pleurer comme un adulte, sous l’effet d’une souffrance purement physique à la limite du supportable. Ce n’est pas ça que je recherche. Je ne veux pas hurler de douleur. Mais éclater en sanglots comme une collégienne qui ferait face à la même situation que celle que je suis en train de vivre. Coller jusqu’au bout à mon personnage. Même dans ces circonstances-là, penser à réagir comme elle le ferait. Abandonner ses réflexes d’adulte. Sous la douleur, c’est difficile. Mais j’imagine que ce n’est pas impossible. Je voudrais donner libre cours à mes émotions comme une enfant démunie, seule, sans défense, victime de l’injustice des adultes, humiliée devant ses camarades, livrée à leurs quolibets et à leurs sarcasmes. Retrouver ces sensations troubles de peine et de plaisir. Allongée, les fesses à l’air, sur les genoux d’une institutrice intraitable pour une leçon mal apprise. D’une tante sévère à qui vos parents vous confient pendant un mois l’été et qui entend bien profiter de votre présence pour vous plier à son autorité. D’une monitrice de colonie trop heureuse de donner libre cours à ses pulsions sous prétexte de faire respecter la discipline.  

Heureusement, la pause est là pour me permettre de respirer quelques instants. De me frotter là où ça chauffe. Et ça chauffe beaucoup ! J’imagine un rouge écarlate. Certainement déjà bien soutenu. Je ne me fais aucun doute là-dessus. Et maintenant, le fouet à longues lanières épaisses. A mon avis, beaucoup plus redoutable que les deux martinets précédents. Je ne me suis pas trompée. Ne pas chercher à me crisper. C’est encore plus douloureux quand le choc ne peut pas être en partie absorbé par le gras du muscle. Par-derrière, ma main tente de faire écran. Peine perdue. Maîtresse Cindy sait trouver l’angle qui lui permettra d’arriver à ses fins. Je n’ai plus qu’à attendre. 

Et à me préparer à l’étape suivante. Le strap, cette lanière de cuir épaisse utilisée dans les collèges anglais pour remettre dans le droit chemin les jeunes filles indisciplinées. Plus la fin approche, plus l’épreuve est douloureuse. D’autant plus que là aussi, comme avec la cravache, Maîtresse Cindy ne se contente pas de me donner des coups sur les fesses mais aussi de passer par-devant pour en gratifier ma verge qui apparemment apprécie. Au point où j’en suis, rien n’est trop bon et si je réagis comme ça, c’est qu’il me reste de la marge. Un indicateur pour Maîtresse Cindy lui montrant qu’elle peut continuer sans s’occuper de rien d’autre. Et elle le fait avec application, méthode, concentration. Jusqu’à la fin du temps réglementaire.  

« Maintenant, Mademoiselle Claire, vous allez vous mettre à quatre pattes. » Nous sommes toujours dans la salle de classe, face à la grille d’entrée. Je peux imaginer que mes petites camarades, attentives au moindre détail, suivent avec intérêt toutes les phases de ma punition. « Prosternez-vous en avant, le front contre le sol. C’est très bien. Comme ceci, vos fesses seront parfaitement tendues et offertes. » Je l’entends s’éloigner un instant dans la pièce d’à côté. Changement de musique. Style chansons populaires. Les feuilles mortes. Les pas des amants désunis… Chansons allemandes aussi. Le son a été poussé. Maîtresse Cindy ne tarde pas à revenir. Je sens immédiatement entre mes fesses la pointe d’un gode. Elle l’introduit prestement. Sans douleur. J’imagine qu’il s’agit du modèle rose qui était posé sur sa table médicale. Puisque j’adore le rose, elle a tout de suite fait le rapprochement avec le reste de ma garde-robe. C’est encore de ma faute si je me punis moi-même ! En plus, il est vibrant. Intensité variable. Je ne peux pas distinguer ce qu’elle fait mais je constate qu’elle peut l’arrêter et le remettre en marche comme elle le souhaite, en appuyant sur un bouton, au gré de sa fantaisie, en fonction du rythme de la musique ou du paddle. Car c’est maintenant avec cet instrument que je suis punie. Un petit paddle en cuir épais, une sorte de palette de forme ovale, certainement étudiée pour la plus grande efficacité. Toujours la même progressivité. Doucement au début, plus rapidement et plus intensément vers la fin. Supporter l’épreuve. Ne pas en rajouter dans les soupirs ou dans les gémissements. Montrer que je suis capable de résister. La musique est forte. La brûlure est intense. Elle ne vient pas tout de suite mais elle se manifeste avec un léger décalage et vous prend à retardement avec encore plus de vigueur. Marche-arrêt du vibreur. Je ne sais plus où me mettre et toujours ce petit short entortillé autour de mes chevilles qui entrave mes mouvements. 

L’épreuve semble terminée. Je n’ose pas trop y croire. Car j’ai bien observé qu’il restait encore les deux paddles en bois. Le temps a-t-il passé trop vite ? Maîtresse Cindy est-elle disposée à faire preuve d’indulgence ? L’histoire ne le dit pas mais la deuxième hypothèse me paraît exclue. En tous les cas, le scénario n’est plus le même. Je suis autorisée à me relever et à revenir vers l’estrade. Je le fais bien volontiers en me tenant les fesses. Apparemment, ce sera la scène finale. Le sac en plastique et le gant noir ne laissent aucune incertitude sur l’épreuve qui va suivre. Celle des orties. Elle m’ordonne de me mettre à genoux juste en bas de l’estrade et dispose devant moi une feuille de papier absorbant. Ah, le papier absorbant ! L’indicateur tangible de la fin de mes tourments. D’un dénouement agréable. Le signe explicite de l’autorisation qui va m’être octroyée de pouvoir enfin prendre mon plaisir. Il n’y a plus aucun doute. Tout va se jouer dans quelques instants. Pouvoir se relâcher après avoir tenu le plus longtemps possible. Elle s’assied devant moi. Juste devant moi. Et baisse ma culotte.  

Quelques tiges magnifiques d’orties amoureusement cueillies le long des fossés quelque part dans la verte campagne. Il ne s’agira pas d’une fouettée comme je peux le craindre mais de caresses insistantes sur ce que j’ai de plus fragile : ma verge, mon entre-jambe, la surface de mes fesses surchauffées. Les feuilles effleurent la surface de ma peau tandis que mon pénis est fermement serré dans l’étau de son gant noir. Curieusement, la piqûre est supportable. Peut-être est-ce parce qu’à cette saison, la nature commence à s’endormir. Dans d’autres occasions et avec les mêmes plantes, je garde des souvenirs plus cuisants. Maîtresse Cindy s’en étonne. Je ne vais pas m’en plaindre. Elle m’autorise à me masturber, à prendre mon plaisir, à aller jusqu’au bout. Simplement, il faudra que je me répande dans le creux de ma main. J’aurais préféré une délivrance plus exubérante mais je comprends qu’assise devant moi, elle ne souhaite pas trop s’exposer à mes effusions. 

Dans l’immédiat, je me trouve un peu sèche. Ce serait tellement plus simple si j’étais lubrifiée. Madame, est-ce que vous pourriez me donner une goutte de gel ? Elle me regarde d’un air sévère, les sourcils froncés. « Cela vous boucherait l’anus… » Je comp rends ma faute. Elle n’a pas besoin de compléter sa phrase… « de me le demander poliment »… « de me dire s’il vous plaît ». Sans doute ai-je été trop brutale. Impatiente d’en finir. Obsédée par ce seul objectif. J’essaie de me rattraper. Mais cette phrase assez dure, je l’entends encore. A ce moment critique et à sa place, je ne l’aurais pas prononcée. Une noix de gel suffit à produire le miracle. Quelques instants encore. Une main puis l’autre. Maîtresse Cindy m’observe. « Vous seriez prête à tout, offerte par-devant et par-derrière, n’est-ce pas Mademoiselle Claire ? » Je réponds oui, non pas pour qu’elle entende la réponse qu’elle attend mais parce qu’à cet instant précis, c’est complètement ce que je ressens et ce dont je serais capable. Mon attitude doit le révéler. Elle n’a même pas besoin de le lire dans mes pensées. Cette dernière image est celle qui fait tout basculer… Je m’abandonne… discrètement… puisque c’est la consigne. Une pause puis Maîtresse Cindy se saisit de ma main gauche et la porte à hauteur de mes lèvres. Je comprends que je n’aurai pas d’autre choix que de boire ma propre liqueur. D’aller jusqu’au bout de ma soumission. J’obéis. Elle me demande quel goût ça a. J’hésite à répondre. Elle le fait à ma place. « Ça a le goût d’un gros bonbon rose ! » Exactement la réponse qu’il fallait pour cette chipie de Claire Grenadine ! 

Maîtresse Cindy me demande de déposer un baiser sur son pied posé sur l’estrade. Je le fais avec plaisir. Le rideau se ferme sur la scène. Les projecteurs s’éteignent. Elle me demande d’essuyer les traces de ma pollution sur le sol. Je rejoins la salle où je me suis changée pour me déshabiller. Avec son accord, je lui laisserai tout un assortiment d’élastiques de couleur pour nouer les cheveux. Ils pourront servir une autre fois. Il faut que je me dépêche. « Il est 19h.15 », me dit-elle en souriant. « Vous allez être en retard ! » Je n’ai pas vu le temps passer. Quand je suis avec elle, il est arrêté. « C’est votre tenue pour faire de la gym ? », me demande-t-elle. Je lui réponds oui. Sans doute y a-t-il un léger malentendu. Je ne vais pas dans les salles de gym avec cet accoutrement mais je m’en sers réellement pour faire du jogging, dans la nature, en province, loin de Paris. Je lui avoue même que j’ai un ensemble identique, blanc bordé d’un galon bleu pâle. Je lui confie que courir dans cette tenue me procure des sensations érotiques très agréables. Quand je croise quelqu’un, parce que cela m’arrive, je prends l’air concentré de la coureuse à pied tout à ses efforts et je guette du coin de l’œil sa réaction. Entrevue fugitive. C’est à peine s’il (ou elle) m’a vue que je suis déjà plus loin. A ce petit jeu, je crois que j’ai dû en surprendre plus d’un et plus d’une.

Douche éclair. Je me rhabille. Nous nous retrouvons dans l’entrée du donjon. Maîtresse Cindy évoque déjà la fin de l’année. Elle a sans doute raison, je n’aurai pas l’occasion de la revoir d’ici-là. Je préfère ne pas y penser. A deux reprises, elle me demande de lui envoyer le compte-rendu de la séance que nous venons de partager. A constater son insistance, je prends conscience de l’intérêt que mes récits peuvent présenter pour elle alors que - je n’ai pas honte de l’avouer - je les rédige dans un but très égoïste et avant tout pour moi. Pour conserver des souvenirs agréables. Pour retenir le cours du temps. Nous nous embrassons. « On s’écrit », me dit-elle.
 

La porte se referme. Je retrouve le bruit de la rue. Il est 20h.20 quand j’arrive à la maison. Dans le bus, l’esprit encore tout encombré des événements qui viennent de se dérouler, j’imagine le dialogue amusant que je pourrais vivre. « C’est à cette heure-là que tu rentres ? Oui, désolée, un travail urgent à terminer. Tu veux la fessée ? Ce n’est pas la peine, c’est déjà fait ! Pardon ? Non, non, rien…. »

 

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Mercredi 18 novembre 3 18 /11 /Nov 17:30

Il faut que j’écrive tout de suite. Quitte à ce que cela déborde. Saisir l’instant. L’émotion. La douleur. Le plaisir. Ne pas laisser refroidir. Trop longtemps après, la spontanéité disparaît. Le propos devient neutre. Objectif. Froid. Raisonnable. C’est triste d’être toujours raisonnable. Une enfance heureuse. Une famille unie. Un bon collège. Des études sérieuses. Des professeurs émérites. Une culture classique. Des résultats honorables. Une carrière assurée. Un emploi stable. Une vie équilibrée...

Et puis un jour, au moment où l’on ne s’y attend pas, un grain de sable s’introduit dans l’engrenage. Tout bascule. Ce jour-là, nous sommes au Musée du Jeu de Paume à l’occasion d’une exposition consacrée aux œuvres de la photographe américaine Cindy Sherman. Au-delà de cette limite, votre ticket n’est plus valable. Le déclic métallique d’un portillon qui pivote sur lui-même. Derrière, une main qui se tend. Celle de Cindy. D’une autre Cindy. Maîtresse Cindy. Faites-moi un baisemain. A défaut de pouvoir vous prosterner pour me baiser les pieds. Oui, maintenant, dépêchez-vous, vous voyez bien, derrière, il y a du monde qui attend.

Le jeu commence. La vraie vie. Celle où je serai enfin moi-même. J’ai de la chance. Non, je ne rêve pas. Elle est là devant moi. Elle est jolie. Telle que je l’imaginais. Élégante dans un ensemble noir. Pantalon court. Veste assortie, croisée sur un top blanc à trous. Qui laisse plus que deviner le galbe de ses seins. Elle ne porte pas de soutien-gorge. Sa poitrine est libre. Sandales argent à talons. Qui a dit que les hommes ne faisaient pas attention à la tenue des femmes ? Et puis ce nuage parfumé qui l’enveloppe. Un sillage qui m’enivre. Je pourrais la suivre les yeux fermés. J’ai l’impression que tout le monde nous observe. Que les gardiens, plus attentifs aux physionomies, ont les yeux braqués sur ce couple curieux. Lui en costume sombre, sa serviette en cuir à la main, et elle, qui ouvre la marche, le regard aimanté par les visages qui nous fixent.

En bon élève, je la suis docilement. Elle m’a demandé de me rendre à l’exposition habillé d’une petite culotte légère sous mon pantalon (« vos sous-vêtements d’été »). J’ai opté pour un modèle très échancré. Rose fluo. Elle me fait descendre aux toilettes pour que je glisse à l’intérieur la petite surprise qu’elle a préparée à mon intention. Une garniture d’orties. Trouble passager. Léger moment de panique. Je n’en demandais pas tant ! Je m’attendais bien à quelque chose. Mais pas à ça. Et pourquoi pas à ça au contraire ? Libre du choix, je la place par-devant. J’aime les sensations fortes. Elle ne pensait pas que je pouvais être aussi maso. Prévoyante, le paquetage comprend aussi un brin de ficelle. Pas n’importe laquelle. Une petite ficelle campagnarde. Celle avec laquelle on lie les pattes des poulets. Ébouriffée, poilue, irritante. Celle avec laquelle je vais pouvoir amplifier mon plaisir en me ligaturant les testicules et le sexe. Après les avoir serrés ni trop ni trop peu. Juste ce qu’il faut. Pour que la douleur soit délicieusement supportable. Qu’elle se rappelle à moi en permanence. Qu’elle me tienne en éveil. Qu’elle ne se laisse pas endormir.

Nous arpentons les salles. Arrêt devant les œuvres. Interpellés par ces visages fixes qui semblent nous juger. Par ce show exhibitionniste qui revêt les formes les plus diverses. Fashion. Fairy Tales. Old Masters. Sex pictures. Broken Dolls. Clowns. Masks. Commment une femme aussi réservée peut-elle devenir complètement allumée sur ses photos ? Depuis trente ans, Cindy Sherman s’est choisie comme modèle unique pour incarner toutes sortes de rôles. Elle est tour à tour attirante ou répugnante, discrète ou impudique, gamine ou vieillissante. Au gré d’un jeu constamment entretenu par la photographe entre l’artiste et son sujet. Où le changement d’identité est porté à la dimension d’une réappropriation critique des apparences sexuelles et sociales. S’offrant comme miroir et modèle à ses contemporains, elle excelle dans la déclinaison des définitions de l’apparence et du genre dictées par les médias contemporains. Dans la mise en lumière de la fragilité du moi face aux mécanismes de l’identification et de la reconnaissance sociale.

Les visiteurs sont loi n d’imaginer le fond de nos pensées ni la nature du jeu auquel nous nous livrons. J’écoute les commentaires de Cindy. Mon esprit est tendu. Le reste aussi. Nos regards se croisent. Esquissent un sourire. Se comprennent en silence. J’adore plonger mes yeux dans les siens. Pourquoi lui ai-je écrit qu’ils étaient bleus ? Je l’observe comme j’observe l’autre Cindy. Celle qui sait se transformer en petite fille, en clown, en star d’Hollywood. A sa façon, elle incarne, elle aussi, les identités les plus diverses. Au gré de ses fantaisies. Mais aussi en fonction de mes fantasmes. Elle n’est pas la seule. Je suis dans la même situation. Nous jouons tous des personnages. Carcan de la reconnaissance sociale, l’image que je renvoie n’est pas celle que je voudrais donner.

A ses côtés, je suis pourtant une jeune collégienne attachée aux pas de sa dir ectrice. Quand la visite sera finie - c’était la sortie de fin d’année - nous retournerons une dernière fois en classe. Si je suis bien sage - mais ai-je vraiment envie de l’être -, j’aurai droit à un goûter. Une mousseline de fruits accompagnée de tranches de banane coupées en rondelles et de petits gâteaux. La bibliothèque rose. Pensez-vous l’avoir suffisamment mérité, Claire ? Tandis que nous refaisons une dernière fois le tour des salles en sens inverse, je tente une réponse positive. Bienveillante. Après tout, je verrai bien. C’est elle qui décidera. Ce qu’il y a d’excitant, ce n’est pas de savoir comment tout cela va s’achever, c’est d’ignorer le chemin qui va nous conduire jusqu’au bout.

La visite est terminée. Nous sortons. Enthousiastes. Il pleut. Les tilleuls de la terrasse des Feuillants nous protègent en partie. Le « timing » est parfait. J’avais commandé exprès un peu de mauvais temps afin de pouvoir sortir mon parapluie et la tenir abritée contre moi. Histoire de me rapprocher d’elle. De respirer son parfum. De voir ses yeux pétiller quand elle sourit. Je dois être un peu amoureux d’elle. La rue de Rivoli déborde de voitures et de passants. Fascinés par les pacotilles disposées sous les galeries. Elle m’arrête soudainement devant une boutique et me glisse deux pinces à seins dans la main. Vous allez les mettre là maintenant, derrière ce présentoir de cartes postales. J’hésite. Elle me fait faire des choses insensées. Pour la première fois de ma vie. Je déboutonne le haut de ma chemise et j’applique les pinces sur mes tétons tandis qu’elle fait semblant de choisir. La Tour Eiffel. Le Moulin rouge. Ne pas se précipiter vers le plaisir. Le sentir progresser. Le ranimer à intervalles réguliers. Le laisser encore inassouvi. Nous avons encore du temps devant nous.

Arrêt venue de l’Opéra. Nous montons dans le 81. Il y a de la place vers le fond. Deux sièges disponibles et qui se font face. Nous nous asseyons. Dites-moi, Claire, ce goûter, vous pensez vraiment que vous l’avez mérité ? Je baisse les yeux et me mets à rougir. Vous ne croyez pas plutôt que vos petites fesses mériteraient le martinet ? A côté d’elle, le passager relève le nez de son journal et nous observe, surpris. La conversation semble prendre un tour intéressant. Je suis rouge de confusion. J’aurais envie de crier : oh oui, Madame, s’il vous plaît, le martinet ! E lle me traite de petite vicieuse et de garce. La plus garce de toutes celles qu’elle connaît. Peut-être qu’elle tient le même discours aux autres aussi. C’est difficile à expliquer mais j’ai l’impression qu’elle le pense vraiment. Après tout, pourquoi pas ? Je n’en ai même pas honte. Cela fait tellement du bien d’être vicieuse et garce.

Comme Cindy, la photographe, elle me révèle à moi-même. Je suis un autre personnage à travers l’objectif. Car pas plus que Doreen, la petite secrétaire dévouée d’« Office Killer » qui tue un à un ses collègues de bureau, je ne suis entièrement conforme à l’original. C’est ma part de liberté. Mon jardin secret. Mon petit nuage.

Alors s’il vous plaît, ne cherchez pas à me retenir. J’étouffe. L’espace m’attire.

J’ai besoin de voler.

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Mercredi 3 mars 3 03 /03 /Mars 19:00

Je souhaiterais revenir quelques années en arrière afin d’évoquer un événement qui m’a beaucoup marquée dans ma vie d’étudiante. Il s’agit de ma participation à l’émission « Le donjon de Maîtresse Cindy », réalisée fin 2006.

« Le donjon de Maîtresse Cindy » est un documentaire d’Irène Omélianenko et François Teste qui s’inscrit dans une série de cinq programmes sur le thème du corps soumis. Il a été diffusé sur France Culture le lundi 9 octobre 2006, dans le cadre de la tranche quotidienne Sur les docks (16h00-17h00) coordonnée par Pierre Chevalier.

Pour écouter l’émission, merci de cliquer ici

 

Telle qu'elle a été présentée à l'époque sur le site de France Culture, l’annonce de cette émission était la suivante :

« Dans le théâtre des passions humaines, le corps soumis s’incarne volontiers dans la taxinomie des perversions (« Psychopathia Sexualis » de Richard von Krafft-Ebing), la littérature (« La Vénus à la fourrure » de Sacher Masoch) et le cinéma (« Maîtresse » de Barbet Schroeder).
Interroger cette soumission du corps a conduit Sur les docks dans le donjon de Maîtresse Cindy où la règle du jeu est celle du plaisir dans l’obéissance et la souffrance. Paroles de maîtresse et dominés se mêlent à l’œuvre musicale de Frédéric Acquaviva, réalisée à partir d’enregistrements inédits lors des jeux sexuels. Avec Alex, Eric et Claire Grenadine… »



L'équipe2 ..

de gauche à droite : Frédéric Acquaviva, Irène Omélianenko, François Teste, Maîtresse Cindy
(photo Barbara Ryckewaert)

L'émission "Dans le donjon de Maîtresse Cindy" a connu un retentissement certain :

 dans les milieux SM tout d’abord, car il n’était pas courant (la situation n’a guère évolué depuis) qu’une dominatrice professionnelle accepte de présenter son activité au grand jour et de donner la parole à ses partenaires. Il suffisait d’oser. L’initiative de Maîtresse Cindy a dans l’ensemble été bien accueillie et a bénéficié de la reconnaissance d’une large partie de la profession ;

dans les médias français ensuite, car ce sujet était loin, on l’imagine facilement, de faire partie du domaine public. Pour France Culture, il s’agissait même d’une première puisqu’aucun document sonore sur le sujet n’avait jamais été diffusé sur les ondes de Radio France. L’émission a d’ailleurs été rediffusée le 14 septembre 2007 ;

sur le plan international enfin, car elle a été récompensée par une médaille de bronze au New York Festivals 2007 dans la catégorie radio community portrait.

Je suis infiniment reconnaissante à Maîtresse Cindy de m’avoir associée à cette belle aventure. Car à mon niveau, je l’ai vécue également comme une première : une première interview à la radio, ce qui est déjà loin d’être anodin, mais aussi et peut-être surtout une première apparition publique de Claire Grenadine sur Internet, grâce aux référencements qu’elle a entraînés, bien avant que je ne me décide à ouvrir mon blog.

Alors en souvenir de cet évènement, j’ai sélectionné trois moments-clés que l’on pourrait regrouper, au moins pour les deux premiers, autour du thème du « making of » de l’émission et qui encadrent cette dernière dans le temps :

avant : c’est la lettre que j’ai rédigée à l’attention d’Irène Omélianenko pour me présenter préalablement à notre rencontre ;

pendant : ce sont les extraits de mon journal qui retracent la façon dont l’enregistrement s’est déroulé dans le donjon de Maîtresse Cindy ;

après : ce sont les questions et les réactions que l’émission a suscitées, telles qu’on peut en juger à travers les propos de Pierre Chevalier, producteur de l’émission.

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Mercredi 3 mars 3 03 /03 /Mars 19:05

Salut Irène,

Je t’appelle Irène parce que Cindy m’a dit que tu étais sa copine et comme Cindy est ma meilleure copine, t’es forcément ma copine aussi. Et puis Irène, c’est sympa comme prénom. Original et sympa. Tu sais, je suis super excitée de te rencontrer. Si, si, depuis deux jours, j’arrête pas d’y penser.

Cindy t’a peut-être un peu parlé de moi. Je m’appelle Claire Grenadine. J’ai 15 ans, je rentre en 3ème au Severity College. Je ne sais pas si tu connais ce bahut mais c’est hyper strict. J’aurais préféré quelque chose de plus cool mais bon, mes parents m’ont pas vraiment demandé mon avis. « Pour ton éducation, ton père et moi avons pensé que c’était le meilleur établissement. » Qu’est-ce que tu veux que je réponde ? En fait, c’est un bahut lugubre, bourré de gens tristes, super craignos. Qui regardent le bout de leurs chaussures en te parlant. Tout ce que je déteste. Je préfère les gens sympa, au moins avec eux on se marre bien. C’est pour ça que j’adore Cindy.

Pour revenir à mon bahut, j’ai fait ma rentrée en retard mercredi dernier (à cause d’un grave accident de trottinette pendant l’été). Cette année, j’ai pas de chance. Tu sais quoi ? Mon prof principal c’est maîtresse Cindy. Une vraie peau de vache. Je le sais parce que je l’avais déjà en sciences naturelles l’année dernière. D’ailleurs ça n’a pas raté, elle m’a dit qu’elle serait très exigeante et beaucoup plus sévère cette année, que c’était normal parce que j’avais grandi (ça c’est vrai, je te montrerai, mes seins ont hyper grossi pendant les vacances), que j’étais devenue responsable et que je devais donner l’exemple à mes petites camarades plus jeunes. Enfin, tu sais, ce genre de baratin que tu écoutes d’un air très pénétré mais que tu oublies aussi vite. Il paraît que je suis bonne élève. C’est vrai que je me débrouille pas mal en français. Par contre, je ne comprends rien aux maths. En fait, ce qui m’intéresse, ce sont les garçons, les booms avec les garçons, les fringues et la musique. Tu sais, quand la musique est bonne… quand elle ne triche pas… quand la musique donne, donne, donne… et qu’elle guide mes pas. En ce moment, mon gros délire, c’est Vincent Delerm, Oasis, Noir Désir et Louise Attaque. Ah oui, j’allais oublier Raphaël. Je connais les paroles de « Caravane » par cœur. Et puis, il est super craquant, Raphaël, non ?

Cindy, c’est ma meilleure amie. L’année dernière on était ensemble au fond de la classe, assises côte à côte. Qu’est-ce qu’on s’est marrées ? J’te raconte pas. Je l’aide pour ses devoirs. Elle m’apprend à me maquiller. Nous parlons surtout des garçons. Malheureusement cette année, nous serons séparées. C’est maîtresse Cindy qui me l’a appris. Je suis sûre qu’elle l’a fait exprès.

Toi, je te connais déjà un peu. Ça t’étonne ? Fastoche, j’ai tapé ton nom sur Internet. Waouuuuuu, le jackpot, c’est dingue ! Y a 10 pages sur toi sur Google. ! Si, si, j’ai vérifié, 477 réponses rien que pour toi. Bon c’est vrai, j’ai pas tout lu, mais j’ai compris que tu occupais un poste super important à la radio. En plus, France Culture, c’est sérieux grave. Moi je préfère les stations méga cool comme NRJ ou RFM avec de la musique sympa. Mais bon, chacun son truc. Eh Irène, faut pas m’en vouloir si j’te parle franchement hein ? « Une voix douce et en retrait qui nous mène vers des lieux où la marge, l’étrangeté s’ancrent dans le quotidien ». Là, je suis restée scotchée, Il faudra que tu m’expliques.

Bon, je te quitte, à lundi. J’essaierai de pas être en retard. Tu sais, j’ai super le trac de passer à la radio. Ce sera la première fois. Alors, s’il te plaît, je veux bien te parler mais sois gentille, ne me juge pas et laisse-moi vivre mon rêve.

Je t’embrasse.

Claire

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Mercredi 3 mars 3 03 /03 /Mars 19:10

 

 

Nous sommes le 25 septembre 2006, il est 17 heures. Comme convenu, je sonne à la porte du donjon. Maîtresse Cindy vient m’ouvrir. Elle est tout en beauté. Veste noire. Pantalon assorti. Bottines souples noires en cuir très élégantes. Petit chemisier blanc à col cassé. Piercing. Elle me tend la main mais je l’attire vers moi pour l’embrasser. Cela la fait rire. Elle me dit que l’équipe de France Culture est là et qu’elle termine avec elle la visite du donjon. Elle a transmis ma lettre à Irène. Celle-ci a, semble-t-il, apprécié à la fois le fond et la forme. En ayant pris le soin de me manifester par écrit vis-à-vis d’elle avant l’émission, peut-être éprouve-t-elle le sentiment de me connaître déjà un peu avant de me rencontrer.

Maîtresse Cindy me laisse enlever mes chaussures et me conduit dans la salle de classe où elle a préparé mes vêtements. Après en avoir discuté avec Irène, celle-ci souhaiterait s’adresser directement à Claire et pas à un partenaire de jeu de Maîtresse Cindy. Ma maîtresse juge donc préférable de me faire revêtir ma tenue de Claire. Elle me demande de ne pas faire de bruit et de mettre mes chaussures en dernier afin de ne pas gêner l’enregistrement. Elle a lavé et repassé mon string rose fluo. Chemisier blanc. Jupette bleu marine. Chaussettes rayées. Petit gilet noir sans manches. Chaussures bicolores. Perruque bleue avec ses deux petites couettes. Pendant que je me prépare, j’entends Maîtresse Cindy présenter à ses interlocuteurs les différentes salles de son donjon, le mobilier, les accessoires, la table médicale, la table d’élongation… Elle me confiera par la suite que les deux hommes de l’équipe découvraient son donjon pour la première fois et ont ressenti un véritable choc !

Elle revient vers moi et me demande si je suis prête. Elle m’aide à me coiffer. Je suis très désireuse que mes deux petites couettes soient bien dressées en l’air (très petite fille !). Oui, ça y est, Je suis prête. Je la sens concentrée et sans doute un peu tendue. Avant d’entrer en scène, je lui demande de m’embrasser. Elle sourit et elle le fait. Nous nous rendons au salon. Elle me présente à l’équipe : Irène Omélianenko, la productrice, François Teste, le réalisateur, et Yves Le Hors, le preneur de son. Nous nous disons bonjour. Je ne sais pas quelle impression je peux leur faire dans mon accoutrement surprenant ! Nous restons debout. Je pensais naïvement que nous allions nous asseoir. Maîtresse Cindy reste avec nous car l’interview mélangera des questions adressées à la dominatrice et à son élève.

Sans transition, l’interview commence. Irène me demande de me présenter. Je reprends le contenu de lettre que je lui ai adressée en la résumant. J’explique que cette année, j’ai Maîtresse Cindy comme professeure principale mais que j’ai effectué ma rentrée en retard à cause d’un regrettable accident de trottinette dans les derniers jours des vacances. Irène me demande de me décrire. Je crois avoir un bon niveau scolaire mais c’est surtout ma conduite en classe qui est loin d’être irréprochable. Turbulente. Insolente. Impertinente. Ma maîtresse intervient dans la conversation pour préciser que je suis également très perverse. Du coin de l’œil, j’observe, amusée, François Teste, légèrement en retrait, qui note, apparemment avec gourmandise, le « best of » de nos échanges sur un petit cahier d’écolier.

Symétriquement, Irène m’invite à dresser le portrait de Maîtresse Cindy. Je cite les principaux traits de son caractère tels qu’ils peuvent m’apparaître à travers nos jeux : son intelligence, son sens de la psychologie, son humour, son attirance pour les surprises, l’imprévu, le défi, le dépassement de soi. J’ajoute qu’elle habite complètement son personnage comme j’essaie d’habiter complètement le mien, qu’elle sait m’accepter telle que je suis, qu’elle n’est pas là pour me juger (elle n’est pas psychiatre) ni pour me soigner (elle n’est pas médecin) et que nous avons développé une forte complicité au fil du temps. Sans chercher à me prendre trop au sérieux (je dois rester une jeune fille impertinente), j’essaie d’exprimer des choses que je trouve importantes et qui me tiennent à cœur. Et puisque ma maîtresse est là pour les écouter, je ne peux pas m’empêcher de m’adresser indirectement à elle plutôt qu’à Irène. Une façon plus personnelle et plus subtile d’exprimer mon sentiment sur notre relation. De lui dire ce que je ressens profondément. De lui faire passer des messages. Car quand nous nous trouvons l’une en présence de l’autre, ce n’est jamais ce genre de sujets qui est au centre de notre relation.

Nous nous dirigeons ensuite vers les grilles du Severity College. Maîtresse Cindy ouvre ces dernières et présente la salle de classe. Irène m’interroge sur le sort qui est habituellement réservé aux élèves turbulentes. Je réponds que celles-ci sont immédiatement punies par Maîtresse Cindy, qui leur administre la fessée à mains nues ou avec divers instruments. Je ne crois pas si bien dire. Ma maîtresse s’approche avec un martinet. Histoire de plaisanter, je lui demande innocemment si elle le destine à Irène. Pas vraiment le moment de rire. Elle m’ordonne de me mettre à quatre pattes et de relever ma jupe. Je suis surprise car je ne pensais pas que nous jouerions la séquence en « live » mais après tout, pourquoi pas ! En bonne professionnelle, elle évite de frapper fort tout de suite et commence par un échauffement, puis les coups deviennent plus appuyés. Je serre les fesses. J’imagine la scène. Le sifflement des lanières. La vision de mes petites fesses dégagées par mon string rose fluo. Le regard des spectateurs qui m’entourent. En plus vous êtes aussi exhibitionniste, Claire !

Maîtresse Cindy me donne l’ordre de me relever et de montrer ma place à Irène. J’avance au premier rang, près du bureau. Maîtresse Cindy extrait de mon pupitre mon cahier Clairefontaine bleu à grands carreaux (chaque élève a le sien) et le présente à Irène. Nous tombons sur la page correspondant à la fameuse dictée de Prosper Mérimée (Le dîner de Sainte-Adresse) où j’ai fait brillamment 10 fautes (on pouvait en faire plus !), puis une autre dictée plus facile mais rédigée à la plume d’oie (attention, les pâtés) où je n’ai eu que deux fautes. Les questions d’Irène reprennent. Comment je me sens dans ce donjon ? Qu’est-ce qui m’attire ici ? Que deviendrez-vous l’année prochaine, l’année suivante, l’année d’après ? Comment avez-vous connu Maîtresse Cindy ? Quels souvenirs conservez-vous de la première séance avec elle (on se souvient toujours des premières fois) ? Est-ce que vous avez peur ? Est-ce que vous venez souvent ? Maîtresse Cindy intervient pour ajouter qu’il nous arrive aussi de nous livrer à des jeux en dehors du donjon. Pour illustrer son propos, je raconte brièvement notre sortie culturelle de fin d’année et la visite de l’exposition consacrée à Cindy Sherman (la brassée d’orties dans la petite culotte, les pinces à seins rue de Rivoli).

Les questions d’Irène ne sont pas blessantes ni trop intimes. Sans doute a-t-elle bien compris le message contenu dans ma lettre (« ne me juge pas et surtout laisse-moi vivre mon rêve »). En lui répondant, je regarde Cindy. Car c’est parfois plus à elle que je parle qu’à mon interlocutrice. Parfois même, je prends Irène à partie (gentiment). Ce n’est pas facile de venir ici pour la première fois. De franchir le pas. De passer à l’acte. De se livrer à quelqu’un que l’on ne connaît pas. Irène termine l’entretien en me souhaitant une bonne rentrée. Je la remercie. Elle a un visage très doux et des yeux bleus très pâles magnifiques. Avant de retrouver l’équipe qui s’est retirée dans le salon, j’attire à moi Maîtresse Cindy et je l’embrasse sur les deux joues. Elle me sourit. Je crois qu’elle est contente aussi. Je lis dans ses yeux qu’elle est satisfaite et pour moi, c’est beaucoup plus important que tout le reste.

S’adressant à l’équipe, elle dit que ce qui l’a frappée en m’écoutant, c’est que j’ai eu recours à des mots ou à des expressions qu’elle aurait elle-même employés (« j’ai eu à plusieurs reprises l’impression que c’était moi qui parlais »). Je suis très très contente d’entendre ce compliment. C’est pour moi le souvenir le plus fort de cette séance. Cela montre combien nous sommes devenues complices. Je reste habillée en Claire. Nous revenons dans le salon. Maîtresse Cindy nous propose un verre de sirop de mûre de son cru (fabrication maison). Nous voilà tous assis autour de la table basse. Je veille à serrer les jambes car ma jupette remonte très haut. Je trouve que mes cuisses sont très appétissantes dans cette position. Cindy et ses interlocuteurs évoquent la suite de l’émission. Ils reviendront jeudi pour la lecture de quelques textes écrits par Maîtresse Cindy, l’interview du deuxième soumis et le choix d’un fond sonore pour l’émission. L’équipe s’en va. Je leur dis au revoir.

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Mercredi 3 mars 3 03 /03 /Mars 19:15

 

 

Invité du séminaire intitulé « Dynamiques contemporaines du document radiophonique », qui s’est tenu à l’initiative du Groupe de Recherches et d’Etudes sur la Radio (GRER) le 31 mai 2008 à l'Université Paris 1 - Sorbonne Panthéon Institut National d'Histoire de l'Art, Pierre Chevalier, conseiller au documentaire à France Culture et producteur-coordonnateur de l'émission « Sur les docks », apporte des précisions sur les conditions de l’enregistrement du documentaire « Dans le donjon de Maîtresse Cindy » et les réactions que ce dernier a suscitées.

Pierre Chevalier : « Ce documentaire a été diffusé il y a environ un an et demi. D'abord, un mot sur notre fonctionnement. Je coordonne cette émission et je travaille avec trois producteurs-coordinateurs, qui sont Irène Omélianenko, Alexandre Héraud et Joseph Confavreux. Nous avons deux attachées de production et six chargés de réalisation. Les producteurs-coordinateurs et moi-même travaillons, bien sûr, avec des producteurs délégués, parce que cela représente un certain nombre d'émissions documentaires et nécessite l'intervention de beaucoup de producteurs. Depuis 2006, date de naissance de l'émission, nous avons travaillé avec quatre-vingt-cinq producteurs.

D'un point de vue éditorial, nous essayons d'avancer à la fois d'une façon sérielle et d'une façon unitaire. Avec aussi des collections. Les objets sériels sont en général quatre ou cinq documentaires réalisés autour d'un thème que quelqu'un a envie de traiter ou d'entendre traiter. Nous réunissons l'équipe toutes les semaines pour mettre sur la table les sujets, les propositions qu'on peut avoir et celles qui nous arrivent.

Irène Omélianenko avait proposé ici une thématique sur le corps extrême. Elle connaissait une Maîtresse et était en mesure de faire un sujet sur son travail. Cela m'intéressait aussi parce que tout le monde fantasme sur cet univers. Le SM n'est pas tout à fait ce que l'on croit en général ; dans la pratique sexuelle, cela correspond à des choses très précises. C'est une sexualité contractuelle, un contrat entre un homme et une femme - peu importe le sexe - avec un objectif bien déterminé, qui est, pour celui qui subit, une utopie de jouissance dans la souffrance. Il y a d'un côté quelqu'un qui demande à souffrir pour ressentir un désir sexuel, et de l'autre un intervenant, ou une intervenante, qui remplit ce contrat et exécute un programme sexuel. Je le répète, c'est très différent de l'image que l'on en a, car ce n'est pas uniquement du cuir, un fouet, etc. »

Christophe Deleu : « Cet univers peut être donné à entendre à la radio ? »

Pierre Chevalier : « Il part d'une réalité. La productrice, le chargé de réalisation et le preneur de son se trouvaient donc dans ce donjon, un endroit très fermé, et Irène avait pu obtenir de Maîtresse Cindy l'autorisation de la suivre partout. Elle avait également obtenu des clients, de ceux qui paient et qui subissent l'exercice - le tarif est d'ailleurs mentionné à un certain moment - le droit d'enregistrer. C'est ce qui m'a intéressé, car on entend beaucoup de lieux communs sur cette pratique sexuelle. Les minoritaires sont les gens les plus exposés. C'est pour cela que ça valait la peine de les « documentariser ». »

Christophe Deleu : « Vous avez pu diffuser tout ce que vous avez enregistré ? »

Pierre Chevalier : « Nous avons diffusé les moments forts. Je me suis opposé avec la productrice à propos de la fin du programme. Il y a donc deux versions : un programme pour les festivals et un autre pour la diffusion. Dans le programme pour la diffusion, la fin se passe chez un client qui prend son plaisir dans l'étouffement. Il se fait donc envelopper par Maîtresse Cindy dans un plastique et il suffoque, le but étant, pour lui, de se procurer du plaisir, d'arriver à un étouffement maximum sans qu'il soit mortel. Nous avons capté la scène réelle ; elle durait à peu près 8 à 9 mn, et elle terminait le programme. Pendant 7 à 8 mn, on entendait le client qui commençait à étouffer. Là, j'ai coupé le programme, bien sûr...

J'écoute le samedi ce programme qui devait être diffusé le mardi suivant. Il me paraît excellent. Cette femme dit des choses intéressantes. En ce qui concerne la fin, il y a une progression, bien sûr, puisque l'action va jusqu'à l'étouffement et que la suffocation progresse lentement. Mais cette partie du documentaire n'est pas fascinante, ni du point de vue sonore, ni du point de vue du sens.

J'admets que proposer sur France Culture, pour une émission toute nouvelle diffusée de 16 heures à 17 heures, une série thématique sur le corps poussé à l'extrême et un documentaire sur les pratiques masochistes, puisse poser problème. Ça peut être pour un « Surpris », émission du soir qui passe à partir de 22 heures 15, ou pour un « Atelier de création radiophonique », le dimanche soir. « Sur les docks » est une émission quotidienne généraliste, diffusée à une heure d'écoute relativement creuse. Son auditoire est très fluctuant et, extrêmement diversifié. C'est une population assez insaisissable, qu'on ne connaît pas, très difficile à cerner, faite de personnes qui écoutent la radio par hasard. Je ne suis pas bégueule, mais cela m'a posé un problème éthique, de déontologie.

Le documentaire était décrit en ces termes dans le contrat avec la productrice : « Exposition du travail d'une dominatrice ». Le mot « sadique » serait faux, car une dominatrice n'est pas une sadique ; c'est une exécutrice effectuant un travail de domination sur une personne qui éprouve du plaisir dans la souffrance. Le documentaire me paraissait très précis sur ce point. Qu'il inclue un homme proche de l'étouffement n'était pas dans le contrat. Ni que l'on diffuse à n'importe qui ce documentaire. Nous sommes d'accord pour qu'il comporte un fragment de la pratique SM et qu'il montre une dégradation de la personne, puisque celle-ci fait partie de cette pratique sexuelle, mais pas pour que cette personne frôle la mort. J'ajoute qu'écouter un homme étouffer pendant 8 mn n'est pas ce qu'il y a de plus renversant ni de plus inédit. François Teste, le réalisateur, a donc coupé 4 mn sur les 7 ou 8 mn de la scène et on a diffusé le documentaire. Bizarrement, cette précaution était superfétatoire car nous n'avons eu aucune réaction. Nous savons qu'il y a généralement entre 20 000 et 50 000 auditeurs et aussi, à l'heure actuelle, entre 2 000 et 5 000 podcasts pour certaines émissions. Nous savons que l'émission est écoutée.

Mais on n'a eu aucun retour ; pas un seul mail. En revanche, les réactions ont été vives en interne. Ce genre de sujet était inédit sur France Culture ; c'est ce côté inédit qui m'intéressait, le fait que cette expérimentation sexuelle puisse être, en effet, documentarisée sans tomber dans de la provocation gratuite. Nous étions dans du réel contractuel. »

Lire l'article dans sa totalité :

http://www.grer.fr/article.php?id_article=61&trie=auteur

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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Jeudi 10 juin 4 10 /06 /Juin 12:00

- Un peu de silence, mesdemoiselles ! Claire, qu’est-ce que je viens de dire ?

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- Vous pouvez répéter ?

- J’en étais sûre ! Comme d’habitude, Mademoiselle Claire sait tout mieux que les autres et se croit dispensée d’écouter ! Je rappelle donc à tout le monde, y compris et surtout à Claire, que pour marquer cette dernière journée de l’année scolaire, il est prévu une sortie en dehors de l’établissement. A des fins culturelles, bien entendu. Je vous emmène visiter un musée. Alors alignez-vous en rangs deux par deux et en silence, et attendez-moi quelques instants, le temps que je m’occupe de Claire. J’ai deux mots à lui dire.

Je ne sais pas ce que je lui ai fait à Maîtresse Cindy mais j’ai l’impression désagréable d’être sa tête de turc. C’est toujours sur moi que ça retombe. Bon, c’est vrai, c’est un peu normal, vu que je ne fais rien pour me tenir tranquille. En fait, j’ai préféré ne pas lui répondre mCG 05 PO 16ais j’avais parfaitement entendu. Un musée ! Non mais vous vous rendez compte ? Il va falloir encore monter des escaliers, se traîner dans ces enfilades de salles à n’en plus finir, rester debout, s’arrêter devant chaque tableau, prendre un air inspiré façon commissaire-priseur, reculer de trois pas et faire semblant de le trouver exceptionnel. L’horreur ! Elle n’aurait pas pu trouver un truc plus rigolo ? Je ne sais pas, moi, un parc d’attractions, une promenade en forêt, un concert de rock ou un bon vieux cinoche. Pourquoi pas un commissariat de police, une prison, un hospice de vieillards ou une centrale nucléaire pendant qu’elle y était ! Et dire qu’à cette heure-ci, je pourrais être au bord de la piscine, en train de me prélasser. Ou de sucer des sucettes à l’anis. J’adore les sucettes à l’anis.

Elle marche devant moi le long des couloirs interminables. Tout compte fait, si je restais au collège, je ne raterais pas grand-chose. En attendant, j’ai comme l’intuitionCG 06 MC 14 que je vais encore passer un mauvais quart d’heure. Mauvais, c’est pratiquement sûr. Quart d’heure, c’est une façon de parler. En général, avec elle, ça dure beaucoup plus longtemps. Eh oui, c’est bien ce que je craignais, elle me conduit à l’infirmerie. Carrelage blanc immaculé. Lumière crue du projecteur. Propreté clinique. Odeur entêtante d’éther et de désinfectant. Pas vraiment de quoi se sentir à l’aise.

- Déshabillez-vous ! Oui, entièrement !

Je devine son regard ironique et sévère se poser sur moi tandis que je lui obéis sans rien dire. Lentement, sous prétexte de ne pas abîmer mon uniforme. Je le plie soigneusement sur une chaise. En fait, j’essaie de reculer l’échéance le plus longtemps possible. Elle n’est pas dupe de ce petit manège.

- Dépêchez-vous, mettez-vous à quatre pattes, les avant-bras et le front contre le sol. Oui, comme ça, prosternée, c’est très bien. Ne bougez plus !

La voilà qui quitte la pièce d’un pas décidé. J’entends les talons de ses bottines noires claquer sur le sol. Le ciel de mes pensées tourne à l’orage. Toutes plus sombres les unes que les autres. Je l’imagine déjà revenir les bras chargés d’une multitude d’instrumeCG 07 Sweet Snailnts divers, les aligner avec soin sur la table médicale, me les présenter au passage sur un ton guilleret, en vanter les mérites respectifs et faire mine d’hésiter entre le martinet, la cravache ou l’énorme battoir en bois.

J’ai tout faux. Elle réapparaît en tenant à la main un récipient à lavement bleu pâle équipé à la base d’une canule flexible de la même couleur. Elle a vite fait d’en introduire l’extrémité au creux de mes reins et d’en ouvrir le petit robinet. Suspendu en hauteur à une potence métallique, le réservoir distille lentement son contenu. Une vague délicieuse se répand en moi et se propage petit à petit tandis que je suis partagée entre la sensation d’une tiédeur apaisante et celle, moins agréable, d’un gonflement irrésistible. Maîtresse Cindy surveille attentivement les opérations, évalue les quantités que je suis encore en mesure d’absorber et finit par couper l’alimentation en me menaçant de la pire des corrections si je ne me montre pas capable de me retenir.

- Relevez-vous et dépêchez-vous d’aller aux toilettes, pendant ce temps-là, je préparerai vos vêtements.

Quand je reviens dans la salle, Madame la Directrice est en train d’inspecter sa garde-robe. Elle a sorti un carton débordant de pièces de lingerie qu’elle examine une par une dans les moindres détails. Ce porte-jarretelles rose bonbon serait parfait s’il n’était pas trop grand. Et puis il faCG 08-copie-1ut aussi trouver le soutien-gorge assorti. Elle fouille, réfléchit, extirpe une paire de collants, change d’avis et décide finalement d’aller opérer un prélèvement dans sa réserve personnelle. Je suis très excitée à l’idée de porter ses vêtements et flattée de présenter les mêmes mensurations qu’elle.

- Vous grandissez, Claire, il faut que vous commenciez à vous habiller en femme.

Déposé sur la table, je découvre ce qu’elle a décidé de me faire porter. Un soutien-gorge noir accompagné du rembourrage qui permettra de lui donner du relief. Ma poitrine est adolescente mais j’espère atteindre rapidement le 95. Un string noir assorti. Un porte-jarretelles blanc avec un petit nœud sur le deCG 09 MC 3vant. Une paire de bas noirs. Je m’habille devant le miroir. Commencer par enfiler les bretelles du soutien-gorge. Puis ramener les mains dans le dos, sentir du bout des doigts la présence des deux agrafes métalliques, tirer légèrement sur l’autre extrémité pour présenter en regard les brides bien à plat. Trois rangs. Le premier devrait suffire. Poursuivre avec le porte-jarretelles. Il y en a qui trouvent ça démodé. Mes camarades préfèrent porter des collants. Je ne suis pas d’accord. Le porte-jarretelles est beaucoup plus féminin, sensuel, troublant. Il met en valeur ce qu’il y a de plus intime, tel un joli cadre qui ferait ressortir la composition d’une toile. Penser à le passer avant le string. Eh oui, ce sera plus facile lorsqu’il faudra baisser ce dernier. Enfiler les bas. Bien vérifier la position de la pointe et des talons. Remonter doucement. Rêver un instant au crissement qui va naître du contact régulier des jambes qui se frôlent. Attacher les jarretelles par-devant et par-derrière en vérifiant leur disposition en biais dans une symétrie parfaite. Les régler à la bonne tension. Au milligramme près. Pour éprouver le plaisir de ressentir à chaque mouvement leur présence élastique en haut des cuisses, à la limite de la chair nCG 10 Newue, fragile, accessible. Enfiler le string. Remonter les côtés très haut de part et d’autre sur la pointe des hanches afin d’accentuer l’échancrure de la découpe et le relief du pubis.

- Maintenant, Claire, vous allez monter sur la table et vous tenir à quatre pattes, les fesses à l’air.

Surprise. Je dois dire que je ne m’y attendais pas. Ce qu’il y a de bien avec Maîtresse Cindy, c’est qu’on ne sait jamais exactement ce qui va se passer. Elle a enfilé un gant en latex. Son doigt enduit de crème se présente à l’entrée de mon anus, en explore les replis, s’y engage avec précaution, en ressort pour y pénétrer à nouveau, lentement, progressivement, profondément, pour le dilater et l’élargir. Je ne devrais pas le dire mais c’est plutôt agréaCG 11 MC 6ble. Cet exercice préparatoire d’assouplissement est immédiatement suivi de l’introduction d’un godemiché vibreur de bonne dimension. Légère résistance au moment crucial de l’engagement. La poussée s’intensifie. Une fois la porte franchie, l’engin coulisse facilement et vient se nicher au tréfonds de mes reins. Maîtresse Cindy semble satisfaite.

- Vous pouvez redescendre.

Elle a tout prévu. Jusqu’aux derniers réglages. Au moyen d’une corde blanche pliée en deux, elle m’enserre étroitement à la taille. De la boucle nouée au milieu de mon dos, les deux brins libres s’insinuent dans la raie de mes fesses et remontent par-devant jusqu’à la ceinture afin de maintenir solidement à sa place ce sexe qui m’empale.

- Renfilez vos vêtements civils et pressez-vous, j’entends d’ici vos camarades qui s’impatientent.

Effectivement, mes petites amies sont très excitées à l’idée de franchir les grilles du collège. Ce n’est pas si souvent qu’elles peuvent le faire. J’aurais bien aimé me joindre à elles et marcher en leur compagnie le long du boulevard mais Madame la Directrice préfère me retenir à ses côtés, en arrière. Elle m’observe du coin de l’œil. J’avance à pCG 10-copie-1etits pas, victime d’une impression bizarre. Car tout est devenu subitement différent. Ma tenue de femme que je sens par-dessous, avec ces seins qui pigeonnent sous le tissu de mon chemisier. Avec ce gode qui m’impose sa présence encombrante au fur et à mesure de ma progression. Avec le lavement dont j’avais cru me débarrasser et qui semble manifester à retardement ses effets imprévus. Pas de quoi pavoiser ! Pour une fois, Claire se tient tranquille. Je me trompe peut-être mais il me semble que tous les passants nous regardent. Maîtresse Cindy sourit et fait comme si de rien n’était. Plongeant sa main dans ma poche, elle tourne la mollette du petit boîtier rose relié à mon godemiché. Je sens des ondes électriques me traverCG 13 straaten-bril-2ser le bas du dos et accentuer mon trouble. Elle me demande s’il m’est déjà arrivé de m’habiller complètement en femme. Je réponds que non. Que ma seule fantaisie est de porter de temps en temps un string pour éprouver la sensation d’avoir les fesses à l’air sous mes vêtements.

Nous passons devant le Moulin Rouge. Encore une centaine de mètres et nous serons arrivées. Voilà, nous y sommes. 72, Boulevard de Clichy. La Directrice nous fait signe de nous arrêter. Il s’agit bien d’un musée. Mais d’un musée particulier. Elle avait simplement omis de préciser qu’il s’agissait du musée de l’érotisme. Les oies les plus blanches d’entre nous ouvrent des yeux ronds en découvrant les lieux. Les autres s’échangent des clins d’œil complices. Mes deux copines, Sophie et Irène, ne peuvent pas s’empêcher de pouffer de rire. Finalement, force est de reconnaître que je m’étais trompée. Elle n’a pas eu une si mauvaise idée que ça, la Directrice.

- Mesdemoiselles, vous n’êtes pas ici pour vous amuser mais pour apprendre. Considérez cette visite comme un complément à vos cours d’éducation sexuelle. Celles qui n’ont pas révisé leurs leçons n’auront qu’à regarder. ECG 12 vstraaten 3lles devraient finir par comprendre.

Tintement métallique des jetons au passage des tourniquets. Nous voilà à pied d’œuvre. L’endroit rassemble une collection permanente de plus de 2000 pièces. Expositions temporaires, collections privées, thématiques, artistes contemporains, amour, humour, art, tradition. Un prestigieux ensemble de toutes les fantaisies érotiques présenté sur pas moins de sept étages.

Au premier sous-sol, un jeu d’adresse attire l’attention de plusieurs d’entre nous. Un groupe se forme. Fixée au mur et couvrant toute la longueur du corps d’une odalisque nue allongée en arrière fond, un fil métallique présente les pièges de ses circonvolutions compliquées. Le but du jeu consiste à les contourner sans les toucher au moyen d’un anneau assujetti au bout d’un manche. Au moindre effleurement, le contact électrique déclenche un gémissement de plaisir de la jeune femme. C’est à qui sCG 14 PO 13-copie-1e montrera la plus maladroite. Les murs se mettent à résonner de râles de plaisir. La visite commence bien.

Partout, des objets de provenances diverses derrière des vitrines. Europe, Amérique latine, Russie, Afrique, Asie. Des scènes érotiques péruviennes en terre cuite. Une impressionnante poignée de porte de maison close en bronze en forme de phallus. Un assortiment varié de bouchons d’anus finement ouvragés et parfois surmontés d’un cabochon de cristal taillé. Une enfilade de mini décors en relief présentant des scènes galantes. Femme à sa toilette. Femme enfilant ses bas. Infirmière. Soubrette. Secrétaire. Religieuse. Madame la Directrice me demande de lui décrire ma scène préférée. Nous sommes dans le salon bourgeois d’une dominatrice chez qui un homme en habit a conduit sa compagne. Celle-ci est à ses pieds, à quatre pattes, les fesses cambrées débordant d’un corset qui lui étrangle la taille, offertes aux lanières du fouet qu’agite une professionnelle aux seins nus, vêtue d’un harnais de cuir et de bas noirs. Un essaim de visiteurs enthousiastes se presse autour des vitrines tandis que Maîtresse Cindy me force à écarter les pans de ma veste pour dégager ma poitrine qui bombe sous mon chemisier. CG 15 PO 72

Par petits paquets, l’ascenseur nous élève au 7ème ciel où nous attend l’exposition temporaire des œuvres de Peter Van Straaten. Style très graphique et « clean » à base de hachures à l’encre noire, offrant une large variété de scènes érotiques sur le thème de l’exhibitionnisme et du voyeurisme. Jeunes couples enlacés, observés à distance par des personnages dissimulés derrière des fourrés. Adolescentes étendues sur la plage, affairées à butiner le sexe de leur compagnon de jeu. Novice prise en main par sa supérieure derrière les murs austères d’un couvent. Lycéens assis en rangs d’oignons sur leur banc, toutes braguettes ouvertes, verges tendues, attendant impatiemment la main caressante qui viendra les soulager. Vue intérieure d’un « salon de léchage » où des femmes confortablement installées dans des fauteuils profonds, cuisses largement ouvertes, reçoivent les soins de jeunes employées à genoux à leurs pieds. Je manifeste mon enthousiasme. Madame la Directrice me demande d’inscrire quelques mots sur le livre d’or. CG 16 SA 3Hésitation avant de trouver la formule percutante appelée à faire date. Je m’applique en tirant la langue sur le côté, de ma grosse écriture ronde à l’encre bleue : « Promenade agréable qui a su aiguiser mes sens, en compagnie de Maîtresse Cindy. Claire Grenadine du Severity College ». Ce n’est pas le moment de faire un pâté !

Plus loin, Irène et Sophie, les joues rouges de plaisir, n’en perdent pas une miette, s’interpellent bruyamment à travers les salles, gloussent et jacassent en se poussant du coude. Aurélie, de son côté, l’air affolée, ouvre d’immenses quinquets en semblant découvrir l’inimaginable. L’indicible. La visite se poursuit. Madame la Directrice s’assure régulièrement du fonctionnement de mon godemiché en me tâtant les fesses à travers mes vêtements. Nous descendons progressivement les étages. Les plus intéressants sont ceux consacrés aux maisons closes (le One Two Two, le Styx, le Chabanais) avec leurs petits boudoirs intimes, leurs alcôves des mille et une nuits, leurs lits de maharajas, leurs salles de torture. Et puis les clients, les dames qui les accueillent. Tout y est. Des messieurs respectables et bien habillés. Des femmes à robes longues et à chapeaux emplumés. Avec des photos, des dessins, des reproductions, et même les feuillets jaunis d’un petit carnet quadrillé où sont précieusement notés de façon codée les visites de ces messieurs ainsi que le montant de leurs « petits cadeaux ». Un monde merveilleux, libéré, ouvert, tolérant, décomplexé, où les gens savaient prendre le temps de vivre et de s’amuser.

…. à suivre

Par Claire Grenadine - Publié dans : Soumission
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  • : L'expérience d'une étudiante du Severity College, établissement réputé pour sa discipline et pour la rigueur de ses méthodes d'éducation
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  • : 12/07/2009

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Si, si, je vous assure, elle est hyper sévère !

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