L'éducation anglaise de Claire Grenadine
- Rappelez-moi, Claire, nous sommes quel jour aujourd’hui ?
- Vendredi, Madame.
- Vendredi, c’est sodomie, n’est-ce pas ?
- Euh, non, pas vraiment (… ce que j’adore, c’est son humour…), mercredi, c’est sodomie (ouf !).
- Ah oui, vous avez raison, vendredi, c’est shibari ! Pour vous, ce sera même shibari-fessée !
- Parce que je le vaux bien ?
- Taisez-vous donc, insolente, et dépêchez-vous de vous mettre en position !
Et hop ! Me voilà juchée sur la table, en petite tenue, dans mon ensemble fétiche « Charlotte », chaussée de mes tennis et de mes socquettes blanches… à mon avis, ça va barder !
En attendant, ce que j’aime bien dans le shibari, ou disons dans le kinbaku, sa variante érotique, c’est que tout est minutieusement pensé, construit, posé, réfléchi, cohérent. Rien n’est laissé au hasard. Vous entrez dans un autre monde. Où le temps est suspendu. Où le silence vous enveloppe. Livrée aux mains de celle à qui vous vous abandonnez en toute confiance, vous voilà petit à petit réceptive à la moindre vibration de votre corps.
Maîtresse Cindy commence par vous attacher les membres inférieurs à partir de la taille. Les chevilles, puis les cuisses. Les cordes filent et sifflent comme des serpents. Entrelacs de nœuds. Lacis de dentelles ajourées. Motifs géométriques. Sensation délicieuse d’une immobilisation qui vous contraint progressivement. Basculée sur le dos, les jambes serrées en tailleur, j’exhibe sans pudeur mes fesses à la correction qui s’annonce…
Échange de consentements mutuels. Et muets. Je m’offre à elle. Elle se donne à moi. En partageant son art. En me communiquant son plaisir. Elle me lie les poignets. La corde remonte au niveau de la nuque et redescend en une construction savante. Jonction du shibari du haut et de celui du bas. Me voilà totalement prisonnière et soumise. Juste à la bonne hauteur. A portée de main. Prête à recevoir ma punition. A me laisser manipuler au gré de sa fantaisie.
Ma maîtresse porte un minishort blanc qui lui arrive au ras des fesses et d’invraisemblables bottes cuissardes roses lacées sur le côté à talons hauts et transparents.
A peine détachée de mes liens, voilà qu’elle me propose - façon de parler - une nouvelle variante. A genoux, cette fois, du moins dans un premier temps. Si ces messieurs-dames veulent bien s’avancer - approchez, les enfants -, ils pourront admirer toute la complexité du motif : le tortillon en forme de poignée par-derrière, l’alvéole hexagonale - en nid d’abeille - par-devant. Je vous laisse apprécier la subtilité des figures géométriques et l’équilibre des effets de symétrie.
Le shibari est beau, c’est une évidence, mais c’est beaucoup plus qu’une technique, c’est un art. A l’égal de l’érotisme. Qui véhicule des sentiments puissants. Des images sensuelles. Des émotions intenses. Des élans irrépressibles. L’exacerbation des sens. Les préliminaires de l’amour.
Voilà, tout est en place, il ne lui reste plus qu’à m’aider à me prosterner en avant en me tenant par la poignée du dos puis à me lier les chevilles et à relier les deux éléments de l’ensemble pour que je me présente à elle les reins cambrés. A nouveau offerte, impudique…