L'éducation anglaise de Claire Grenadine

SANY0102 copieDans le cadre de ma scolarité au Severity College, Maîtresse Cindy m’a inscrite à un stage de Shibari afin de perfectionner mes connaissances. Shibari ? De quoi s’agit-il ? Quand elle m’en a parlé pour la première fois, j’ai ouvert des grandes mirettes. Le point de croix, d’accord mais le Shibari ? Pas vraiment le sujet dont me parle habituellement ma maman à la maison. Vous verrez bien par vous-même, Claire, notre petit groupe se réunit le 11 décembre, je vous présenterai.

Alors, en attendant et piquée par la curiosité, je me suis précipitée sur les bonnes pages de Wikipedia : 

« Le kinbaku est un type de bondage sexuel japonais entrant dans le cadre de jeux sadomasochistes. Il implique d'entraverSANY0003~ copie celui (ou celle) qui tient le rôle de personne soumise en utilisant des figures géométriques prédéfinies à l'aide d'une cordelette, habituellement de 6 à 8 millimètres de diamètre, faite de chanvre ou de jute. Le mot Shibari signifiant « attaché, lié », utilisé au Japon pour décrire l'art de ficeler les colis, est devenu l'appellation la plus courante, dans les années 1990, en Occident, pour désigner l'art du bondage kinbaku. »

Intéressant… pas mal… pas mal du tout… continuons…

« Le bondage japonais diffère du bondage occidental par le fait qu'au lieu de simplement immobiliser le sujet ou de pratiquer sur lui certaines SANY0090 copiecontraintes, les techniques de Shibari ajoutent à cette notion de base un point de vue esthétique (voire érotique) et une stimulation des centres d'énergie en des points précis du corps (Shiatsu). La personne soumise prend du plaisir par la tension de la corde qui lui écrase les seins ou les parties génitales. L'intensité des sensations procurées au sujet ligoté est fonction de sa position. Le bondage japonais est connu pour faire appel à des positions asymétriques qui exagèrent l'impact psychologique du bondage. »

Rien qu’à la lecture, j’étais déjà très excitée… mais je l’étais aussi pour une autre raison… il me tardait de faire la connaissance des membres du groupe. « Dissidence Bondage », c’SANY0087 copieest son nom. Un drôle de nom ! Il faudra qu’on en reparle.

Alors le jour venu, pour être à la hauteur de l’événement, j’ai soigné ma tenue de collégienne. Ben oui, quoi, ma façon à moi d’entrer aussi en dissidence. Parure de lingerie Charlotte, chemisier blanc, jupe plissée bleu marine, couettes attachées avec des élastiques roses, cravate de collège anglais et mon badge « Je veux la fessée ». Naughty girl. Prête !

Les invités arrivent. La dissidence commence par l’habillement. Chacun a revêtu la tenue qui l’inspire. Combinaison en latex ou en vinyle. Petite robe noire décolletée. Haut en imitation léopard sur un pantalon hyper moulant. Dans sa tenue gothique avec ses froufrous blancs et ses lacets croisés, Rita Mitsouko s’est tout juste échappée des images d’une manga. Cela ne pouvait pas mieux tomber. Arrivée d’Akiha, l’héroïne de la journée, une toute petite japonaise, professionnelle du Shibari au Japon, débarqSANY0050 copieuée tout droit de Tokyo afin de nous montrer un aperçu de ses talents. Elle est accompagnée de Florian, un grand samouraï - sans son armure ni son sabre - avec une petite barbiche et des cheveux d’ébène tressés en chignon, qui a le mérite de parler le japonais et de pouvoir servir d’interprète. 

La séance se met en place. Chacun[e] choisit son camp - bondageur, bondageuse, modèle - et se répartit en cercle autour de la présentSANY0123 copieatrice. Je fais partie des modèles. Normal. Je préfère souffrir que faire souffrir. Si en plus la souffrance est érotique et que je me trouve exhibée en public, c’est encore mieux. En binôme avec Cindy. Normal aussi. Cindy est ma maîtresse. Disons en l’espèce, ma maîtresse de stage.

La japonaise choisit Fausttine pour partenaire. Une petite brune expressive et meSANY0107 copienue. Excellent choix. J’adore Fausttine. C’est ma copine. Je l’ai déjà rencontrée dans une autre occasion (voir « Claire à la radio »). Je vais en plus avoir la chance de la voir souffrir un peu. Je vivrai le kinbaku par procuration. Décidément, j’ai bien fait de venir….

Chacun bondage l’autre. Apparemment, la technique est déjà bien rodée. Shibari classique au niveau du buste, les bras repliés dans le dos. Les cordes font ressortir mes seins. Cindy me le fait remarquer. Elle a raison. Pour une fois que je peux les mettre en valeur sans me faire gronder, je suis aux anges !

Mais le clou du spectacle, c’est la performance d’Akiha, au centre du cercle. Elle donne l’impression de maîtriser parfaitement sa discipline et enchaîne différentes figures en faisant preuve d’une grande dextérité.

D’abord lSANY0136 copieigotée, Fausttine est ensuite suspendue au palan. Sa partenaire vérifie à plusieurs reprises que rien ne la gêne et que sa sécurité est assurée. Sans trop rien connaître du Shibari, je comprends qu’à ce degré de complexité et de raffinement, non seulement nous avons quitté le niveau primaire du bondage statique au sol pour nous élever en quelque sorte dans plusieurs dimensions de l’espace, mais qu’en plus, dans cet état d’apesanteur, le grand art consiste à faire évoluer le modèle d’une position à l’autre tout en le laissant suspendu. La japonaise arrive ainsi à libérer Fausttine au niveau d’un bras ou d’une jambe selon son inspiration tout en maintenant le reste de son corps étroitement et solidement attaché. Comme si le bSANY0142~ copieondage était un art modulaire et constitué d’éléments qui peuvent être associés ou dissociés.

Une petite remarque au passage (et sur la pointe des pieds, venant d’une néophyte) : si j’ai été surprise par la rapidité d’exécution d’Akiha, j’aurais préféré un tempo moins rapide, plus progressif, plus érotique, partant du principe que selon moi, l’art de lier s’apparente moins à un concours de vitesse qu’à une pratique dont la lenteur permet précisément au ligotage d’induire son plein effet.

A la fin de ce premier tableau, lorsque Fausttine est progressivement libérée de ses liens et qu’elle retrouve la terre ferme, tout le monde applaudit. Le Shibari est une épreuve physique au sens propre du terme, autant pour le modèle que pour celle qui bondage. Une pause permet aux uns et aux autres de reprendre leurs esprits. Pour la démonstration suivante, c’est Cécile qui remplacera Fausttine. Mais comme l’heure tourne et que ma maman risque de s’inqSANY0146~~ copieuiéter, je trouve plus sage de filer discrètement à l’anglaise…

En quittant la séance à l’entracte, j’ai bien conscience de faire sécession… d’entrer moi aussi en dissidence…

Dissidence, parlons-en ! D’abord, le mot est rigolo, il me plaît bien, il a un côté un peu anarchiste, soixante-huitard… ni Dieu ni maître… il est interdit d’interdire… sous les pavés la plage…

Alors dans le contexte, la dissidence, pourquoi ? Je comprends que le désaccord porte beaucoup moins sur le fond que sur la forme. Qu’il a principalement une origine historique liée aux méthodes d’enseignement contestables du premier professeur du groupe, qui a réussi le tour de force de faire progressivement le vide autour de lui… SANY0147 copie

Pour le reste et paradoxalement pour l’essentiel, le groupe me semble au contraire tout à fait uni autour des valeurs du bdsm en général et du Shibari en particulier. Autrement dit, rien de ce que j’ai pu voir ne peut, à mon sens, être qualifié de strictement dissident. Les figures sont minutieusement décortiquées, examinées, reproduites, enchaînées, vérifiées, commentées, discutées… les plus expérimentés mettent leurs connaissances au service de celles ou de ceux qui débutent. Le tout se passe dans le respect de l’autre et dans la bonne humeur. Chacun apporte au groupe la sensibilité qui lui est propre. En tout cas, si la SANY0156 copiedissidence existe, elle se situe en l’espèce à l’extrême opposé de l’improvisation. Et l’appel à une spécialiste de cet art peut être au contraire perçu comme le souhait d’un retour aux sources de la technique.

Peut-être même les membres du groupe sont-ils encore plus exigeants vis-à-vis du respect des traditions. Je crois comprendre qu’ils ne sont pas complètement d’accord avec toutes les méthodes utilisées par Akiha et que le recours aux ciseaux - peut-être en vue d’accélérer un processus qui aurait été autrement beaucoup plus long à dénouer - est vécu un peu comme une offense aux principes et comme un crime de lèse-majesté.

Au demeurant si être dissident, c’est surveiller sa montre pour être sûr de ne pas rater le début de la « Nuit Élastique » qui doit démarrer en début de soirée quelque part à bord d’une péniche sur la Seine, je peux vous assurer que plusieurs membres du groupe sont vraiment dissidents… donc, tout va bien, merci !

Je suis revenue à la maison, ravie, enchantée. Bigoudi, un peu moins quand je me suis précipitée sur lui pour reproduire de mémoire quelques figures qui m’avaient marquée… Bigoudi, c’est mon chat. Sur le fond, il a raison, le Shibari est un art qui ne s’improvise pas…

Mer 23 mar 2011 1 commentaire
Belle analyse d'une journée particulière du groupe Dissidence Bondage, avec la venue de cette belle et élégante japonaise qui nous a dit être autodidacte et prête à innover dans cet art dont les règles sont normalement rigoureuses comme un sumotori. Pour ma part, je me pose encore la question, peut-on être dissident et soumis, ?... En tout cas, j'apprécie cette ambiance où on peut croiser des Rita Mitsouko, des écolières en fleurs, des fans de latex, des Maitresses artistiques ou des photographes de talent.
chris - le 11/04/2011 à 20h33