L'éducation anglaise de Claire Grenadine

Paris, le 26 novembre

Madame la Directrice,

Selon l e s informations qui m’ont été communiquées par Claire, le Severity College aurait été contraint de fermer ses portes ce matin à titre de précaution et pour une période indéterminée à la suite de la découverte de plusieurs cas de grippe A (H1N1) parmi les élèves.

Cette nouvelle ne m’aurait pas intrigué - l’actualité nous montre malheureusement que la pandémie progresse à vive allure - si ma fille ne me l’avait pas présentée comme une bonne nouvelle, une sorte d’aubaine qui allait lui permettre de rester tranquillement à la maison en attendant que la situation revienne à la normale.

Je souhaiterais que vous me confirmiez cette information. Il me tarde, en effet, de connaître la vérité car j’ai de bonnes raisons de me méfier, échaudé par le premier mensonge qu’elle m’avait déjà servi à la rentrée de septembre, soi-disant reportée sine die, compte tenu du fait que les travaux de rénovation des salles de classe n’étaient pas terminés, que le recrutement des professeurs avait pris du retard et que les emplois du temps n’avaient pas pu être synchronisés. Les élèves pouvaient donc rentrer chez elles. On les convoquerait le moment venu.

Je ne vous cacherai pas qu’à l’époque, cet état d’impréparation d’un établissement tel que le vôtre m’avait paru bizarre. Mon intuition était fondée. A force de questionner ma fille, ses explications se sont révélées de plus en plus embrouillées et elle a fini par avouer qu’elle avait menti dans l’espoir de pouvoir profiter de quelques jours de congés supplémentaires avant, selon son expression, de « retourner en prison ».

Elle a été immédiatement punie. Fessée déculottée devant tout le monde. Privation de sorties. Séances quotidiennes de martinet matin et soir pendant une semaine, suivies d’une mise en pénitence au coin.

Je suis déterminé à recommencer si cette histoire de grippe A se révélait, comme je le crains, inventée de toutes pièces. J’ai d’ailleurs averti Claire que les fessées familiales n’étaient pas grand-chose au regard de ce qui l’attendait au collège, que j’allais immédiatement rétablir la vérité auprès de vous, et que vous sauriez prendre les mesures nécessaires.

Je vous l’envoie donc au plus vite. Vous jugerez par vous-même. Je ne doute pas qu’elle saura une fois encore trouver un prétexte pour se justifier mais je préfère d’emblée vous mettre en garde contre son imagination particulièrement fertile. Il est à mon sens grand temps que vous la repreniez en main. J’apprécierais que vous manifestiez vis-à-vis d’elle la plus extrême fermeté. N’hésitez pas à recourir au strap, au paddle en bois plein ou percé de trous, ou mieux encore à la canne anglaise. Je m’en remets totalement à vous et je vous laisse l’entière liberté de recourir au châtiment que vous jugerez approprié. Celui qui la fera revenir le plus rapidement possible dans le droit chemin.

Vous savez combien j’apprécie les méthodes d’éducation en vigueur dans votre établissement et l’importance que vous accordez à la discipline.

Par avance, je vous remercie infiniment pour votre intervention et vous prie d’accepter, Madame la Directrice, mes très cordiales salutations.

Charles-Henri Grenadine

Jeu 26 nov 2009 Aucun commentaire